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liqucs. Les Vénitiens en remplirent le fameux nèfor de réglile de Saint-Marc , & les François en apporrèrent pulilriurs en France diirant les croifades. Depuis très-longtemps, la belle tête do Julie, fille de Titus , & plufieurs gravures repréientant des fujeta profanes , Icinc confondues a"ec les reliques dans le trèfor de l’abbaye de ^aint-Denys.

On no peut fans doute excufor un fi grand fond d’ip-norance de ces fiècles barbares, & c’efl cependant à ce défaut de lumières que nous fommes redevables de la confervation d’une infiniré de précieux morceaux de gravures antiques, qui autrement auroient couru le rifque de ne pas arriver jufqu’à nous. Car enfin fi ceux qui vivoienc dans ces fiècles barbares euiTent été plus éclairés, le même ïèle de religion qui leur faifcic rechercher toutes fortes de pierres gravées pour en parer les autels & les reliques, leur eût fait rejetter toutes celles qui avoient rapport au Paganifme, & les eût peut-être engagés à les détruire.

On fent combien cette perte eût été grande, q land on réfléchit fur l’utilité qu’on peut reretirer des pierres grareis. Je ne parle pas des prétendues vertus occultes qu’on leur a attribuées ; ce n’efV pas ici le lieu de s’arrêter à ces folles idées ■- je ne prétends pas non plus relever ici le prix & la beauté de la matière : mais je parle d’abord du plaifir que fournit à l’efprit le travail que l’art y fait mettre. Ces précieux ref !:es d’antiquité !bnt la fource 4’une infinité de connoifTances ; ils perfeâionnent le goût , & meublent l’imagination des idées les plus nobles & les plus magnifiques. C’elî ; de deux pierres gravées antiques, qu’Annibal Carrache a emprunté les penfées de deux de Tes plus beaux tableaux du cabinet du palais Farnefe à Rome. L’Hercule qui porte le ciel eft une imitation d’une gravure antique qui eu chez le roi.

Quoique les pierres gravées ne foient pas des ouvrages aufli fublimes que les admirables produdicns des anc’ens fculpteurs, elles ont cependant quelque avantage furies bas-reliefs, & fur les uatues. Ces avantages naiffent de la matière même des pierres gravées & de la nature du travail. Comme cette matière efl très-dure, & que le travail eft enfoncé, (il n’efl : ici queflion que des gravures en creux) l’ouvrage eft à l’abri de s’ufer par le frottement, & !e trouve en même temps garanti d’un nombre infini d’autres accidens que les grands morceaux de fculpture en marbre n’ont que trop fouvent éprouvés.

Comme il n’ell risn de fi fatisfaifant que d’avoir des portraits fidèles des hommes illuftres de la Grèce & de Rome , c’eil encore dans les pierres gravées qu’on peut les trouver j PIE

c’efi : où l’on peut t’alTurer avec le plus de cef» titude , de la vérité de la reflemblance. Aucun trait n’y a été altéré par la v. uflé ; rien n’y a été émouffé par le frottement comme dans les médailles & dans les marbres. Il efl encore confolant de pouvoir imaginer que ces flatues & ces grouppes qui furent autrefois l’admiration d’Athènes & : de Rome , & qui font l’objet de nos juftes regrets, fe retrouvent fur les pierres gravées. Ce n’efl point ici une vaine conjeélure ; en a fur des pierres grave’es indubitablement antiques, la reprélèntation de plufieurs belles flatues Grecques qui fubfiftent encore. Sans fortirdu cabmet du roi de France, on y peut voir, fur des cornalines, la ûz~ tue de l’Hercule Farnefe , un des chevaux de Monte-Cavallo , & le grouppe de Laocoon. Indépendamment de tous les avantages qu’on vient d’attribuer anx pierres gravées , elles en ont encore un de commun avec les autres monumens de l’antiquité ; c’efl : de fervir à éclairer plufieurs points importans de la mythologie, de l’hiftoire & des coutumes anciennes. S’il étoit poffible de rafTembler en un feul corps toutes les pierres gravées qui (ont éparfes de côté & d’autre , on poutroit fe flater d’y avoir une fuite affez complette de portraits des grands hommes, & de divinités du Paganifme, prefque toutes caradérifées par des attributs finguliers qui ont rapport à leur culte. Combien n’y verroit-on pas de difFérens facrifices. Combien de fortes de fêtes , de jeux & de fpectacles qui font encore plus intéreffans, lorfque les anciens auteurs nous mettent en état de les entendre par les defcriptions qu’ils en ont laif-Cées !


Cet ;e belle pierre gravée du cabinet de feue-S. A. S. MADAME , où efl repréfenté Théfée levant la pierre fous laquelle étoient cachées les preuves de fa naiffance ; cette autre du cabinet du roi , où Jugurtha prifonnier eft livré à Sylla , ne deviennent elles pas des monumens curieux , par cela même qu’elles donnent une nouvelle force au témoignage de Plutarque , qui a rapporté ces circonflances de la vie de ces deux grands capitaines ( Vies de Théfée & de Marius )

Il faut pourtant avouer que , de cette abondance de matière , réfulteroit la difficulté infurmontable de donner des explications de la plus grande partie de ces pierres gravées. Mais quoique ces fortes d’explications ne foient pas fufceptibles de certitude , quoique nous n’ayons fouvent que des conjeftures fur ces fortes de monumens que nous poffédons , cependant ces conjectures mêmiî conduifent quelquefois à des éclairciflemens également utiles & curieux. La chute de l’empire Romain entraîna celle des beaux arts. Ils furent négligés pendant très-longtemps, ou du moins ils furent exer-