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luxeiribourg. Le grand homme , auteur de ce poème complet , a réuni tout ce que ]a peinture peut produire de plusféduifant par les couleurs riches & brillantes, & ce que l’imagination peut créer de plus noble pour intéreffer & élever l’ame dans les fujets les plus familiers. On ne peut aiTez admirer,dans cette fuite de vingt-un tableaux, l’étendue du génie qui a pu faifir un fi grand enfemble , en y réunifiant tout l’accord & toute la variété dont il étoit lufccptible : la difpofition des fuiets, leur choix, celui des fires , fe correfpondent pour diverftfict chaque tableau par un nouvel inrérêt. Toujours dirigé par un goût exquis , Rubens a placé une Icène prefque toute hiftorique & d’intérieur, c’eft le couronnement delà reine JIJarie Je Médieis , en face du confeil des Dieux 6- de la. pourfuite des vices , pu tout efr nud, tout eft -.allégorique , tout eft poétique. Le tableau qu’il a placé dans le milieu , efl un mélange d’allégorie & d’hiftoire, diftribué pour contrafter avec les deux autres dont je viens de parler, & pour former le paflage délicieux de l’une à l’autre de ces fcènes différentes. Ce tableau du milieu fe divife en partie toute poétique : l’apothéofe d’ Henri -le-Grand , & en partie hiftorique : la régence donnée à la reine,

C’efl : à la vue de ces rapports fi propres à enchanter les fens , qu’on goûte tout davantage de la repréfentation pittorefquç d’une même hifVoire , lorfqu’elle eft conçue par le même génie. D’abord , comme je viens de le faire voir , les formes de toutes les compofitions font difpofées les unes pour les autres , & offrent une utile & fage variété ; qualité précieufe qui fait fentir l’inconvénient de la difparate toujours produite par l’emploi de différentes mains. En fécond lieu , il exifte dans un ouvrage forti de la même palette, un accord général de coloris qui n’eft varié que par la différence des fujets & des fîtes. Il faut convenir que cette harmonie eft auifi néccffaire aux yeux dans un enfemblr en peinture , que le âiiéme ftyle dans un poème épique, qui malgré la diverfité des avions & des images , y répand une liaifon feule capable de faifir &. d’enivrer l’efprit du leûeur. Nous concluons . donc avec affiirance que la même hiftoire en peinture , deftinée à être vue dans le même lieu , veut être traitée de la même main. Les tableaux de l’hifloire de la Vierge dans le chœur de Notre Dame , ne font pas à l’œil J’effet d’une même hifloire. Et dans la galerie deTouloufe, les tableaux diftingués qui y font raffemblés étant tous de divers auteurs , femblent contredire l’uniformité de la décoration générale , quoiqu’ils ne foient pas réunis pour y tracer une même hiftoire. Ainfi deux chofes doivent corcçurir à produire un bel enfemble, dans une fuite de tableaqx difpofés dans le même lieu, pour former une hiftoire fuivie ; fayoir : i». la variété dans les formes des compofitions & la fymmétrie des ornemens , x°. l’actord général dans le coloris. Tout cela produit une conformité de manière qui eft d’une telle néceÏÏité , que les entrepreneurs de ces fortes de fuites en gravures, ont eu l’attention d’exiger des graveurschargés des différentes planches, que le travail des tailles &c la valeur du ton général Çuffent^à peu-prèsles mêmes, & c’eft avec ce foin qu’ont été gravées la galerie du Luxembourg , dont je viens de parler, celle de Verfailles, du palais Farnèfe , &c. Or, qu’on fe repréfente un inftant ces fuites exécutées de toutes fortes de manières, même par les plus habiles graveurs ; favoir, une eftamce par Mellan , 1 autre de NVifcher, celle -’là par P. Pontius , celle-ci pa’r Drevet ou MatTon cette autre par Nanteuil, &c. Par cette fuppofition , on jugera nettement de notre onin ;on fur la nécelFice dejormer de la même’ main un poème en peinture de plufieurs chants. _ Je fais qu’il eft un aune genre de (peciacîe pittorefque à offrir dans une gallerie ou dans un grand cabinet ; c’eft celui de la rétoion des genres & des écoles. Alors !a variété y eft du plus grand intérêt. Les celkaions du roi de France, du Palais - Royal , ie Turin de Florence, du palais Pitti, de Doria , de Barberin, des fouverains de Drefde, de l’impératrice de Ruffie , & beaucoup d’autres font fentir tout l’attrait de ces aflemblages où l’on peut fuivre les diverfes manières des écoles de peinture dans leurs difFérens âges, ce qui les a diftinguée-s entr’elles , ce qui caraélérife le goût particulier de chaque peintre, & ce qui montre en quoi chacun d’eux a changé de fiyle , de ton & de coloris. L^n efprit obfervateur y apprendra furtout qu’il eft en peinture toutes (brtcs Je moyens de plaire ; que , comme je l’ai dit, tout ce qui eft neuf , ’original & piquant, fous quelqu’afpoa que ce foit, a dea droits à l’approbation d’un homme qui fait juger des différentes parties de l’art, & que pour lui , il n’exille pas de beautés exclufives. Terminons cet article , où j’ai tizhé de’ raffembler ce que la peinture a de droit à notre eftime Se à notre admiration , tant par ce qu’elle exige de connoiffances , que par ics effets qu’elle produit, en déplorant la perte des belles colleâions qu’on voyoit à Paris au milieu de ce fiècle. Après la more des hommes dégoût qui les avoient formées, elles ont été difperfées ; des Crozat & des Juliienne il ne nous refte plus, que le fouvenir de leur amour pour la peinture. Les chefs-d’œuvre de l’art qu’ils officient publiquement pour Ces progrès, à la curiofué dg leurs concitoyens &