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encore un des plus grands monumens que les hommes, dans aucun temps, aient jamais élevé à la gloire des lettres, des sciences, & des Arts.

M. de Voltaire désiroit ardemment une nouvelle édition de l’Encyclopédie, où les fautes de la première fussent corrigées ; c’étoit pour cette nouvelle édition qu’il avoit fait ses Questions sur l’Encyclopédie.

Mais le grand défaut général de l’Encyclopédie, celui qui rendoit cette nouvelle édition absolument nécessaire, regarde le plan même. Ce défaut est la confusion des objets, résultante de la loi qu’on s’étoit faite mal à propos de renfermer toutes les connoissances humaines dans un seul & même dictionnaire, au lieu de donner à chaque science, à chaque art son dictionnaire particulier. Dans l’ancienne méthode, tous les articles sembloient jetés au hasard, tous étoient égarés, déplacés, étrangers les uns aux autres, coupés & séparés les uns par les autres ; rien ne se tenoit, c’étoit l’image du chaos ; les objets les plus disparates se rapprochoient, les objets analogues se fuyoient : & quiconque a voulu mettre de la suite de l’ensemble dans l’étude d’une science, a été obligé d’en rassembler péniblement les divers articles dispersés dans vingt-un volumes in-folio, & comme perdus dans ce vaste océan ; de faire, en un mot, pour son usage particulier ce que nous faisons aujourd’hui pour l´usage du public.

On ne peut trop faciliter au lecteur l’instruction, sur-tout dans un livre destiné à l’instruire de tout ; & on ne peut mettre trop d’ordre dans un livre qui rassemble toutes les connoissances.

Il faut que chaque science ait son dictionnaire, & que ce dictionnaire soit comme un traité complet sur cette science.

Mais les idées de dictionnaire & de traité ne sont-elles pas contradictoires ? Non, & c’est à concilier ces deux choses que cette nouvelle édition est principalement consacrée

Quelques personnes auroient voulu qu’on eût abandonné la forme de dictionnaire, comme essentiellement contraire à l’ensemble & à l’unité, & que l’Encyclopédie n’eût été qu’une suite de traités sur les différentes sciences

Ces personnes se trompoient ; ç’auroit été multiplier les difficultés de l’instruction, & par conséquent aller directement contre le but.

Il faut, dans un ouvrage de cette nature, que tout homme trouve, au moment où il le desire, une instruction facile sur l’objet dont on veut être instruit, & sur cet objet seulement : il veut éclaircir un point, se rappeler un trait, une anecdote, savoir la signification d’un mot, l’usage d’un instrument, l’origine d’une institution, &c. ; or c’est ce qui ne peut se trouver que dans un dictionnaire, sans être obligé de parcourir des traités entiers, où souvent, après de pénibles recherches, on finit par ne point trouver ce dont on a besoin.


Mais s’il faut faciliter l’instruction particulière & l’étude des détails, ce qui ne peut se faire que par un dictionnaire, il faut, d’un autre côté, faciliter l’instruction générale & l’étude de l’ensemble, ce qui ne peut se faire que par un Traité ; il faut donc que, suivant le besoin de l’instruction & le désir du lecteur, le dictionnaire puisse facilement le convertir en un traité ; c’est ce qui arrivera, au moyen d’une indication, que donnera chaque auteur, de l’ordre dans lequel les divers articles doivent être lus, pour former un traité suivi & complet sur chaque matière : par-là tout sera remis à sa place ; cette Encyclopédie, par ordre des matières, réunira les avantages & des dictionnaires & des traités, sans avoir les inconvéniens de l’une ni de l’autre méthode, & tous les ordres de lecteurs seront satisfaits.

« On ne pourra plus, dit un des auteurs de la nouvelle Encyclopédie, dire d’un ouvrage exécuté sur ce plan, ce que les gens mal intentionnés disoient avec exagération de l’ancienne Encyclopédie, mais ce qu’ils ont pu quelquefois dire avec fondement de plusieurs de ses parties, qu’elle ne tenoit lieu de rien à ceux qui vouloient approfondir & qui désiroient une instruction suivi, qu’elle trompoit l’espérance même de ceux qui ne vouloient qu’y retrouver des faits, ou qu’y chercher des définitions. »

Le célèbre Bacon, qui a donné la première idée de cet ouvrage, ne se proposoit pas d’en faire un seul dictionnaire ; il savoit que cette forme trop générale, qui sépare ce qui devroit être joint, qui rapproche ce qui devroit être séparé, qui mêle les sciences les plus sublimes avec les métiers les plus communs, n’étoit point propre à son plan.

Supérieurs à Bacon, & placés dans un siècle plus éclairé, MM. d’Alembert & Diderot entreprirent ce qu’il n’avoit fait que projeter. Ces deux grands Philosophes savoient bien que la nomenclature n’étoit convenable qu’aux seuls ouvrages, qui ne traitent qu’une matière, comme cela a lieu dans cette édition ; & ils n’ignoroient pas combien cette même nomenclature avoit d’inconvéniens pour un recueil qui embrassoit toutes les matières ; mais croyant ne faire que dix volumes, ces inconvéniens leur parurent supportables. Malgré cela, il n’en sera pas moins vrai qu’un des plus beaux monumens de l’esprit humain est dû à leurs travaux ; & bien loin de chercher à leur en enlever la gloire, on se propose de rendre ce monument plus durable, plus digne des regards de la postérité, en perfectionnant sa construction, complétant toutes ses parties, & en donnant au tout une meilleure forme.

1°. La correction des fautes dont tout le mérite & toute l’attention des auteurs n’ont pu préserver la première.

2°. L’addition de tous les articles omis & de