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P E A les espèces d’arbres pittoresques que l’on trouve rarement dans son pays. Ainsi l’artiste François observera les pins, les cyprès qui ne sont pas communs en France. Il en observera la couleur de diverses distances. De toutes ces choses, il faut faire des notes avec des croquis pour s’en pouvoir ressounvenir dans tous les temps & ne jamais se fier à sa mémoire : les idées s’effacent bien facilement, si rien ne les fixe. »

PE

PEAU (subst, féminin) ce mot est d’usage pour le dessin & la sculpture, & on dit, les mouvement & les plis de la peau sont bien rendus : ce n’est pas assez d’être savant dessinateur, il faut encore faire sentir la peau, &c.

La premiere de ces locutions seroit susceptible d’une longue discussion. Nous allons tâcher d’être concis, & de dire cependant tout ce qui est essentiel sur cette matière. Les artistes n’ont pas toujours étudié les principes qui doivent déterminer l’emploi des détails de la peau, ou leur exclusion, Delà sont venues des manières absolues, qui dans les uns ont produit des ouvrages pleins de molesse, & dans les autres de la sécheresse & une extrême dureté.

Cependant les artistes antiques ont écrit clairement ces principes dans ces chef-d’œuvres qui nous ont été conservés ; & les bons observateurs ont bien vu que ces anciens maîtres n’ont pas introduit de détails dans les statues de leurs divinités, ni dans celles qui étoient destinées à être placées à une assez grande distance des spectateurs.

Examinons d’abord le motif de leur procédé dans la représentation des figures divines. On conviendra que les petites rides, les mouvemens fugitifs de la peau, toutes ses inégalités accidentelles ou individuelles amoindrissent l’expression des muscles, seuls organes des mouvemens du corps humain.

Les formes que donne la peau sont accidentelles quand elles naissent ou de l’abondance des graisses ou de l’infiltration de la lymphe, ou enfin de la lâcheté de la fibre qui fait produire des plis dans la vieillesse ; elles sont individuelles par les habitudes grossieres de nos membres, ou par la qualité épaisse, molle ou dure de son tissu. Les formes des muscles au contraires sont nécéssaires, parfaites & invariables dans l’état de perfection. Alors la peau n’est plus qu’une enveloppe douce, fine, qui, sans matieres intermédiaires, suit toutes les formes des muscles & ne laisse échapper de leur netteté & de leurs actions que ce qu’ils ont de trop dur dans leurs insertions & de trop


roide dans la figure des tendons qui les terminent. La peau adoucit infiniment les impressions des glandes, des grosses veines & des aponévroses dont les détails n’offrent rien d’utile aux mouvements, & qui n’ayant rien de fixe & de résolu, produisent des passages incertains, pauvres & souvent même rebutans.

Les Dieux représentes par l’art dans les formes convenables, ont dû être étudiés dans le nature humaine prise au moment de sa vigueur, & dans la beauté corporelle que donne une éducation active. Les statues antiques n’y admettent donc rien qui ne soit utile, choisi & distingué ; d’où est venu le style qu’on nomme sublime.

Quant au motis qui a pu déterminer les anciens à ne mettre que les grandes masses des formes dans les figures éloignées de la vue, il découle tout naturellement ; 1°, de l’effet de la vision à laquelle les détails échappent à une grande distance : 2°, de ce que les minuties amolissent les formes, de ce qu’elles nuisent à leur unité, & de ce qu’elles donnent à l’ouvrage le caractère de la foiblesse & de l’indécision.

Mais gardons nous de conclure à la vue de ces figures exemptes des détails de la peau que les anciens ignoroient l’art de les exprimer. Il suffit pour nous convaincre de leur excellence dans le rendu des rides & des plis, de considérer un certain nombre de leurs plus belles têtes, la figure de Seneque, & surtout celle du Laocoon pere où tous les passages d’une peau agitée par le gonflement des veines, la crispation des muscles cutanés, & la contraction violente des tendons, se font sentir de la maniere la plus légere, la plus moëlleuse, & en même tems la plus précise.

D’après les éclaircissemens auxquels ce sujet intéressant nous a conduits, il est aisé de juger dans quels cas, & à quel degré on doit faire sentir la peau, & cela me conduit à examiner la seconde maniere d’employer ce terme : faire trop sentir la peau est le défaut où tombe l’ignorance de certains dessinateurs ou sculpteurs qui ne sachant pas lire sous la peau, la cause des mouvemens, ne sont affectés que des détails que présente cette enveloppe ; d’où il résulte, comme je l’ai dit, un ouvrage mou, dont le défaut ne peut être jamais racheté par la maniere d’opérer la plusragoutante, pour me servir de l’expression consacrée à ce mérite d’exécution.

Ne pas faire assez sentir la peau, est le défaut de ces savans myologistes, qui, trop confians on leurs connoissances, ne copient pas assez la nature, & n’opérent que d’après le résultat de leurs études anatomiques. Nous les comparerons, dans un genre à la vérité très-supérieur, à ces froids grammairiens qui