Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/664

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
MOS MOS 531


avec quatre autres vers sur la révérence qu’on doit avoit en approchant de l’autel. Toute l’église de Saint-Irenée en étoit aussi pavée, & l’ouvrage même en est assez grossier & ne peut gueres être plus ancien que celui d’Enay ; c’est-à-dire, environ du dixième sciécle. On en a trouvé encore ailleurs des fragmens, particulièrement du côté de Fourvière qui a été l’endroit de la ville le plus habité.

Celle dont je vais parler fut trouvée en l’année 1676. dans la vigne de Mr. Cassaire à Lyon.

Le pavé qui est resté entier long d’environ 20 pieds & large de 10, est tout orné de cette mosaïque à carreaux & compartimens différens & fort ingénieux : dans le milieu est un quarré d’environ trois pieds de haut & quatre de large, où est représenté un grouppe de quatre figures.

Il est facile de voir par les pièces qu’on a rompües de ce pavé, qu’on faisoit une couche épaisse de deux travers de doigts ou environ, avec un stuc fait de chaux & de poudre de marbre dans lequel on enchassoit & rangeoit de petites pierres, ou de petits marbres, taillés en quarrés longs ; environ la moitié de leur longueur étoit enchassée dans le ciment, comme les dents dans la machoire. Pour y représenter les figures qu’on vouloit, ceux qui y travailloient devoient entendre parfaitement le dessin & choisir des pierres de différentes couleurs, comme blanc, rouge, noir, & grisâtre, pour faire les couleurs, & les ombres selon leur disposition.

Ces couleurs étant naturelles, le temps ne pouvoit les effacer : en effet, celles que l’on trouve à présent n’ont rien perdu de leur couleur, ni de leur vivacité.

Felibien dans son livre intitulé principes d’architecture, sculpture, & peinture, parle de la pratique de cette façon de peindre.

Il est a remarquer que des satyres étoient souvent représentés dans les mosaïques payennes ; ce qu’on peut inférer de ces vers de Nilus, epigramm. liv. 4.

Πῶς ἐκ λίθου ἄλλοθεν ἄλλης
Συμφερτὸς γενόμην ἐξαπίνης σάτυρος

C’est-à-dire, comment est-il possible que de plusieurs pierres jointes ensemble je sois devenu si promptement un satyre ? Il faut que ce pavé ait été fait du temps que les Romains étoient maîtres de cette ville, & qu’ils étoient encore Payens, puisque leurs Dieux y sont représentes. La belle manière & la beauté du dessin me font croire qu’i1 a été fait dans le premier ou second siècle salon de notre ére, & ce pouvoit être un salon de quelque maison d’une personne de qualité, plutôt que d’un temple dédié à ces divinités ; car il semble que dans un de leurs temples on n’auroit pas représenté sur le pavé, des Dieux qui auroient pû être foulés aux pieds par ceux qui seroient venus pour les adorer : on les auroit plutôt placés dans le chœur ou sur les autels, pour y être exposés aux yeux de tous ceux qui les visiteroient.

Voici quelques inscriptions dans les quelles il est fait mention de pavés vraisemblablement de mosaïque.

à Rome.
silvano et mercurio sacrum
ti. claudius epictetus
et claudia herois
ex voto. l. m.
ar. et paviment. s. p. rest.

C’est une inscription consacrée à Silvain & à Mercure par Tiberius Claudius Epictetus & par Claudia Herois qui avoient remis sur pied a leurs dépens un autel avec un pavé, pout s’aquitter d’un vœu qu’ils avoient fait.

Il y a apparence que le pavé dont il est parlé dans cette inscription étoit un pavé de mosaïque, ou de pièces rapportées ; car autrement on n’auroit pas fait mention d’un simple pavé dont les frais n’eussent pas mérité qu’on en eût parlé. C’est dans ce sens que Cicéron dit simplement que le portique de sa maison étoit pavé.

Gualtherus, dans ses inscriptions de la Sicile, en rapporte une qui se lit sur un pavé de mosaïque d’une église de Syracuse, où il est dit qu’un certain Cneus Octavius avoit refait le pavé, & tout le temple dédié autrefois à Vénus.

En voici une qui est à Florence & qui y a été apportée d’Afrique, il y est fait mention d’un ouvrage appellé opus albarium.

…..stae sacrum
Aurelii maximi medici et l. avrelii veri
aug. armeniaci parth.
templum cum arcu et porticibus et ostieis
et opere albari a fund.

On peut probablement suppléer la première ligne, où il manque quelques caractères, Junoni Augustœ sacrum ou Dianœ ou Veneri Augustœ sacrum mais ce qu’on en peut dire de certain, c’est que cette inscription étoit pour quelque temple bâti du temps & apparemmént del’ordre des empereurs Marc Aurelle & Lucius Verus qui portoient les titres de très-grands, de Mediques, d’Armeniaques & de Parthiques ce temple ayant été érigé depuis les fondemens avec une arcade, des portiques, & des portes, le tout blanchi & enduit de chaux :


Xxx ij