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aufll bien que lui , il faudroît avoir le fentiment qui l’animoit ; mais avec quelqu’adrefle dans la main , on parvient à exceller dans le genre qui eft accueilli par les amateurs , & récompenfé par le débit de l’ouvrage. Si Audran pouvoit renaître , il faudrait qu’il détruisît Ton art pour en tirer fa fubfiftance. (102) Michel Corneille, né à Paris en 1642 , mort en 1708 , peintre habile, qui a gravé à l’eau-forte d’une manière très-moè’lleufe, & avec beaucoup de goût. Il favoit affez manier le burin pour donner l’accord & la couleur aux travaux qu’il avoit établis à la pointe. Les graveurs ne confulteroient pas fans profit fes eftampes ; elles pourraient contribuer beaucoup à leur faire vaincre la froideur que le mécanifme de leur art eft capable d’infpirer. (103) Jean Luyken , né à Amfterdam en ■ 1649, mort en 1711 , a gravé d’après fes propres defîîns , & eft plus remarquable par l’abondance & la richeffe de l’es compofitions que par le travail de fa pointe, qui n’eft cependant pas fans mérite. On en jouirait mieux , s’il eût mis plus d’accord & plus de variété de tons dans fes travaux.

(104) Gérard Edelinck, né à Anvers en 1649 , mort à Paris en 1707. Ce fut Colbert qui l’appella en France. On reconnoît en lui le compatriote de ces fameux graveurs , élèves de Rubens. Son travail , en même-temps fier & précieux , annonce un fentiment profond de la couleur. Son burin eft plus foigné que celui des Vorfterman , des Bolfwert fans être moins pittorefque : mais chez lui le foin ne dégénéroit pas en petiteffe , & n’entraînoit pas cette longueur de temps que les graveurs mettent aujourd’hui à leurs ouvrages , qui leur infpire l’ennui de leur art , & amène avec lui la froideur. La grandeur & le nombre de fes eftampes témoigne fon étonnante facilité. Que l’on jette un coup - d’œil rapide fur fa Madeleine pénitente ; on en admire l’effet , l’exprefïion , la propreté. Qu’on la regarde plus attentivement ; on eft : étonné de la hardieffe de touche qui y règne, & c’eft précifément cette touche qui y répand un efprit de vie. Ce fecret femble être mort avec lui pour les graveurs au burin. Le Bran , dans cette eftampe , paraît grand colorifte, & l’on doit avouer que ce très-habile maître , traduit par Edelinck & par Audran , femble avoir eu des perfections qui lui man» quoient. Edelinck n’a pas fait d’ouvrages médiocres ■- on trouve dans tous de la chaleur , toutes fes têtes font vivantes. On compte entre fes chefs-d’œuvre la Sainte-Famille d’après ïtaphaël , la famille de Darius devant Alexandre , la Madeleine & le Chrift aux anges d’après le Brun, les portraits de Desjardins, de le Brun , I de Rigaud ; mais de toutes fes eftampes , c’étoit j Au portrait de Champagne qu’il donnoit la pré- | Tome I. Beaux-Arts*

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féreflce , & on ne lui refufera pas la qualité de connoiffeur. Sa Sainte-Famille eft plus vantée que tout le refte , parce que c’eft le premier ouvrage qui ait fait fa réputation-, on continua, lorfque l’auteur le fût furpaffé lui-même , a répéter les éloges qu’on avoit donnés d’abord à cette eftampe, qui eft en effet d’une très-grande beauté.

(105) Pierre van-Sc h uppen, natif d’Anvers & contemporain d’Edelinck -, fut appelle comme lui par Colbert, & la France fembloit avoir le droit de revendiquer un artifte à qui elle avoit donné l’éducation ; il étoit élève de Nanteuil. Comme fon maître , il a gravé des portraits d’après fes propres deffins. Il mérite d’être placé entre nos meilleurs graveurs au burin , Se fon deffin eft correcl. Il a fur-tout gravé des portraits entre lefquels ont peut diftinguer celui de Vander Meulen ; mais il s’eft fait auffi de la réputation par la gravure de l’hiftoire &c fur-tout par fa Vierge d’après Raphaël. On ignore le temps de fa naiffance, mais on fait qu’il eft mort à Paris en 1702. Son nom ferait plus célèbre, fi Edelinck n’avoit pas été fon émule ; on peut céder fans honte à un rival fi redoutable.

( 106 ) Les deux frères Pierre & François Aquila , florilTbient en même-temps en Italie par un genre très-différent. Ils étoient natifs de Palerme, & ont gravé à Rome à l’eau- forte vers la fin du dix - feprième fiècle. Us ont publié de bonnes eftampes d’après de grands maîtres, tels qu’Annibal Carrache , Carie Maratte, &c. La bonté du deflin fait le principal mérite de leur travail qui étoit un peu maigre , mais bien conduit. Au refte, ce n’eft qu’en général qu’on peutleur reprocher cette maigreur ; on connoît des eftampes de Pierre Aquila qui font d’une pointe trèsmoëlleufe.

( 107 ) Nicolas Dorigny , fils cadet de Michel, dont nous avons parlé, naquit à Paris en 1657, & eft mort dans la même ville en 1746. Il fut d’abord avocat , quitta le barreau pour la peinture , & celle-ci pour la gravure. Il alla étudier le3 grands maîtres en Italie, & y refta vingt-huit ans. C’eft l’un des plus habile» graveurs qui aient afibeié la pointe au burin , & peut-être doit-il être regardé , après Gérard Audran , comme le premier graveur pour la grande hiftoire : quoique bon defïïnateur , fon deffin n’eft pas d’un aulFI grand goût que celui d’ Audran , tk l’es travaux font moins pitrorefques. Ses eftampes de laDefcente de croix d’après Daniel de Voltaire , de la Transfiguration de Raphaël , des cartons de ce même maître que l’on conftr /oit à Hamptoncourt,le rendront tou* jours célèbres. Il difpofoit fes travaux d’une manière méplate qui leur donnoit une grande fermeté , & il femble avoir manié le burin avec autant d’aifance que la pointe. Tout, dans l’es gravures , refpire la facilité ; il femble que rien C c.c