Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/463

Cette page n’a pas encore été corrigée
322 FUY FUM

dans sa hardiesse & dans l’habitude de sa main. Ceux qu’il séduit le trouvent brûlant, parcequ’il exprime avec facilité les froides conception de son ame. (Article de M. Levesque.)

FRUIT (subst. masc.) Il est inutile d’employer ici ce mot pour exprimer le fruit qu’on retire de l’étude, dans la peinture, si ce n’est pour dire qu’il n’est pas égal à celui qu’elle produit dans les sciences abstraites, & que le fruit se réduit à bien peu de choses dans l’art, si l’on n’est pas doué par la nature des qualités propres aux arts d’invention.

Peindre des fruits est un genre qui n’est guère séparé de celui de peindre des fleurs ; mais il offre moins de difficultés. D’abord, les fruits sont plus faciles à copier, parce qu’ils changent moins promptement de formes & que le peintre a tout le tems de les bien imiter. D’un autre côté, si la richesse des couleurs, la douceur du duvet, sont des beautés communes à ces diverses & précieuses productions de la nature ; les formes détaillées des fleurs, & ce qu’elles montrent de feuilles diaphanes, est une tâche qu’on n’a point à remplir en peignant des fruits.

Les fleurs demandent donc une touche légère & variée, une transparence de tons qui particularise le talent du peintre de ce genre ; tandis que la pâte, la largeur la fierté du pinceau avec lequel on rend le mieux les fruits, est un mérite commun à l’exécution d’un tableau d’histoire ; celui qui se destine à ce genre, profitera aussi beaucoup de leur étude ; parcequ’il y acquerra les moyens de colorier avec fraîcheur & puissance, & qu’en particulier il saura exécuter des fruits dans tous les sujets qui seront susceptibles de cet agréable & brillant accessoire. (Article de M. ROBIN.)

FUYANT . (part. act. pris quelquefois sustantivement, car on dit le fuyant d’un corps, les fuyans d’un tableau.) C’est un terme de l’art de peindre consacré à la partie du clair-obscur. Les personnes peu instruites l’employent souvent pour les mots lointains, dégradation de ton, de teinte, &c.

La partie fuyante d’un corps est celle qui échappe à l’œil, qu’il ne voit qu’en raccourci, avec laquelle enfin les rayons visuels forment un angle très-aigu.

Pour en rendre l’effet en peinture, il faut observer de ne jamais employer les plus grands clairs ni les plus grands bruns dans les tons qui doivent produire le fuyant d’un corps ; mais l’œil peu exercé, l’esprit peu nourri des principes des effets de la lumière, sont facilement trompés par le ton du fond sur lequel l’objet est détaché.

J’ai dit qu’on ne devoit jamais user des pius grands clairs, ni des plus grands bruns sur les parties fuyantes. Voici une maniere simple de démontrer la justesse de ce principe. Faites avec du papier très-blanc un rouleau, tenez-le perpendiculairement, & de manière qu’il reçoive le jour latéralement, par rapport au spectateur ; opposez à ce cylindre un fond brun. Dans cette position, l’œil peu exercé verra la forte lumière sur le bord du rouleau du côté du jour : illusion produite par le brun qui lui sert de fond. Car si vous remplacez le fond brun par un fond blanc ; exposé à la grande lumière, il n’y aura personne qui ne voie alors que la partie fuyante du rouleau qui sembloit très-claire, n’est qu’une demi teinte qui se détache en brun sur le fond blanc éclairé, & le plus grand clair de ce rouleau se verra sur la partie la plus proche de l’œil : par cette observation le ton réel de la partie fuyante sera donné.

Il faudra agir en sens contraire pour avoir celui d’un corps brun. Donnez lui pour fond un objet éclairé plus clair que lui, les parties fuyantes du coté même de la lumière paraîtront très-brunes : opposez à ce corps brun un fond plus brun que lui ; vous verrez alors que les parties fuyantes ne sont pas les plus grands bruns ; mais que les noirs se trouvent dans la partie de l’ombre la plus opposée aux rayons lumineux.

Ce principe est appliquable à tous les fuyans des corps ronds, soit qu’il soient composés de plusieurs petites parties comme une grappe de raisin, les masses feuillées d’un arbre, ou que ce soit un corps qui ne soit pas divisé, comme une colonne ou tout autre corps solide dont on appercevra plusieurs faces. (Article de M. ROBIN.)

FUMÉE (subst. fem.) Cette vapeur mérite l’attention du peintre. Elle a fourni à Léonard de Vinci un chapitre dont nous allons profiter.

Les milieux des tourbillons de fumée en sont les parties les plus obscures : ils s’éclaircissent & prennent de la transparence en approchant de leurs extrêmités ; ces extrêmités elles-mêmes se perdent & se confondent avec les objets qui leur servent de fond.

Puisque la fumée se termine imperceptiblement, les ombres qu’elle porte ne seront pas elles-mêmes terminées, & leurs bornes seront indécises : elles le seront d’autant plus, qu’elles seront plus éloignées de la fumée qui les cause ; elles paroîtront légères, voltigeantes & tourbillonnantes comme elle. A peine la fumée changera-t-elle l’apparence des objets qui seront