s’obstiner à un travail pénible & ingrat auquel ces changemens le condamnent.
Premiérement, il seroit moins exposé à fatiguer ses couleurs.
Secondement, il profiteroit mieux de ses fautes, en les conservant sous ses yeux, & quelquefois peut-être reviendroit-il à ses premières dées, après s’être convaincu par la comparaison qu’elles étoient moins défectueuses que l’ardeur de se surpasser lui-même ne le lui avoit suggéré.
La méthode de plusieurs grands maîtres d’Italie étoit, à cet égard, différente de la pratique de la plupart des nôtres.
Ils composoient des esquisses, dans lesquelles ils faisoient tous les changemens qui leur sembloient nécessaires ; ils exécutoient ensuite un tableau de cette composition arrêtée, d’une dimension beaucoup moindre que le tableau qu’ils avoient projetté : ils terminoient ce tableau de manière à s’en trouver satisfaits ; alors ils commençoient & exécutoient sans s’occuper de rien changer ; & ce repos d’esprit leur laissoit tout le soin que demandoit la correction & le beau faire, le soin de conserver leurs couleurs pures, leurs tons brillans, enfin celui de ne rien fatiguer dans les beaux ouvrages que nous admirons.
Je ne discuterai pas les avantages que peuvent trouver les artistes qui, par un autre procédé, usent d’une liberté presqu’indéfinie de changer sans cesse. Certainement cette indépendance séduit ; ils peuvent la justifier : elle semble convenable à la nature de leur talent, & satisfait l’imagination ; mais elle entraîne souvent une perte considérable de tems ; elle fait contracter, sur-tout à mesure qu’un avance dans sa carrière, une incertitude & une habitude d’être mécontent de soi, trop contraire à l’avantage utile de l’artiste, & prive ceux qui aiment les arts de nombre d’ouvrages qui se trouvent ensevelis les uns sous les autres, & qui la plupart auroient assurément participé du talent & du mérite de celui qui les a sacrifiés.
Si l’on ne peut espérer de faire changer les artistes qui ont commencé de pratiquer avec cette indépendance, il pourroit être utile de les engager à asservir leurs élèves à suivre une marche moins indecise ; & dans nos écoles, ce service seroit peut-être plus essentiel que dans les autres, relativement au caractère national, & au penchant général de la jeunesse qui s’exerce dans les arts d’imagination.
Je suppose, comme on doit le penser, les exceptions qu’exigent dans l’application de ce conseil les differences particulières de disposition & de talent. (Article de M. Watelet.)
FAUX-JOUR (subst. comp.). Le tableau qu’un DANS Pas dit le fils n’est Jour, ous qu’il est Couleur DANS non faux jour, when where du lieu sur le
voir, il parôit dessus un luisant qui empêche de bien distinguer les objets. (Article de l’ancienne Encyclopédie.)
FÉCONDITÉ (subst. fém.), faculté de produire duite un grand nombre d’ouvrages. Elle ne suppose pas toujours une grande abondance d’idées. Souvent, dans les arts & dans les lettres, on a confondu la fécondité avec cette foiblesse d’où résultent de fréquens avortemens.
Il en est des productions des hommes comme de celles des plantes. L’arbre qui donne la plus grande quantité de fruits, n’est pas celui qui les donne meilleurs.
Les ouvrages des arts ne peuvent devoir leur parfaite maturité qu’à un travail réfléchi. L’artiste qui se satisfait trop aisement, risque de ne satisfaire que lui seul, & de ne se distinguer que par une facilité stérile.
Des artistes se sont fait une réputation par leur fécondité ; on n’a pu refuser de l’estime à une qualité qui, supposant un travail facile, suppose aussi la connoissance & la pratique d’un grand nombre de moyens de l’art : mais cette réputation n’égalera jamais celle qu’on accorde à des ouvrages réfléchis. Le Tintoret, le Giordano ne partageront jamais la gloire des artistes de la premiere classe, de ceux dont les ouvrages sont le fruit d’une pensee profonde & profondément exprimée.
Il faut bien remarquer que la fécondité n’est jamais qu’une qualité d’exécution, & que les artistes sages & sévères, qui n’ont fait aucun ouvrage sans en bien penser le sujet, sans en bien raisonner toutes les parties, ne se sont jamais signalés par une extrême fécondité.
C’est sur-tout un malheur pour les jeunes artiste, de vouloir se distinguer par la fécondité dans l’âge où ils ne devroient se piquer que d’une étude opiniâtre. Ils pourront acquérir la sorte d’estime qu’on accorde aux productions de la main ; ils n’obtiendront jamais celle qui est réservée aux productions de la pensée.
Il ne faut pas confondre la fécondité avec l’abondance des idées, qualité qui tient au génie. Les artistes les plus féconds en idées, n’ont pas été les plus féconds en ouvrages.
Si l’on appelle idée cette première pensée encore vague dont il résulte un croquis, il ne sera pas difficile d’être fécond. J’appelle pensée dans les arts cette opération de l’esprit qui dirigeoit toutes les parties des chefs-d’œuvres de Raphael, du Poussin, &c. la parfaite observation de toutes les convenances, l’expression la plus conforme à la situation de chaque personnage, & les moindres parties du tableau concourant à l’expression principale que l’auteur s’est proposée pour objet.
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