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ENCYCLOPÉDIE


PAR ORDRE DE MATIERES,


OU


BIBLIOTHEQUE COMPLETE

DE TOUTES LES CONNOISSANCES HUMAINES.

La méthode des Dictionnaires, inconnue à l’antiquité, est d’une utilité qu’on ne peut contester ; ils sont faits pour être le dépôt des Sciences ; & l’Encyclopédie imaginée par MM. D’ALEMBERT & DIDEROT, achevée par eux & par leurs Associés, avec tant de succès, malgré ses défauts, en est un assez bon témoignage.

VOLTAIRE, Q. sur l’Ecycl. p. 278, T. III, & Mélanges.

UNE édition de l’ECYCLOPÉDIE, par ordre de matières, est sans doute une entreprise utile ; mais l’époque de son exécution est le moment qu’il faut saisir pour donner à ce grand ouvrage toute la perfection dont il est susceptible. Cette perfection consiste principalement dans l’ensemble & l’accord de ses différentes parties. Dans toutes les éditions de l’Encyclopédie, publiées jusqu’ à ce jour, les matériaux qui la composent sont accumulés & confondus, & n’ont d’autre ordre que celui de l’alphabet. Les objets les plus disparates se touchent, se heurtent, & se succèdent brusquement. Les parties de cet ensemble sont brisées & rejettées à des distances éloigées. La chaîne en est par-tout interrompue : enfin il naît de ce mélange un désordre dans les choses & dans les idées, qui égare le lecteur, & qui ne lui laisse aucun fil pour se guider dans ce vaste labyrinthe.

Le projet d’une Encyclopédie universelle, raisonnée & méthodique, rangée par ordre de matières, de laquelle on feroit disparoître l’ordre alphabétique, quoique très-séduisant dans la spéculation, est cependant impraticable dans l’exécution, parce que l’Encyclopédie étant un dictionnaire, on ne peut pas tirer des traités didactiques de ce genre d’ouvrage, quelque parfaits qu’ils puissent être d’ailleurs : qu’on prenne, par exemple, le Dictionnaire de Chimie de M. Macquer[1], qui passe pour le meilleur ouvrage de ce genre ; celui qui entreprendroit d’en faire disparoître l’ordre alphabétique pour n’en composer


qu’un Traité de Chimie, n’en feroit qu’un ouvrage imparfait, parce que l’Auteur n’a point disposé & travaillé ses matériaux dans cette vue, ni pour cet objet : il en est de même de toutes les parties de l’Encyclopédie. On peut en tirer des Dictionnaires généraux & particuliers, les compléter, les corriger, leur donner toute la perfection dont ce genre d’ouvrage est susceptible ; mais on ne feroit que des ouvrages imparfaits, si l’on entreprenoit de faire de chacune des parties autant de Traités suivis, desquels on feroit disparoitre l’ordre alphabétique.

Non seulement c’étoit une nécessité de ne faire de l’Encyclopédie que des Dictionnaires particuliers ; mais quand la raison de nécessité n’eût point existé, une Encyclopédie divisée par ordre de matières, dont chaque partie seroit un Traité suivi de science ou d’art, ne pourroit être qu’un ouvrage imparfait & très-dangereux à tenter. Dans ce dernier plan, il faudroit donc refaire une nouvelle Histoire Naturelle. Il faudroit de même refaire des ouvrages suivis sur tous les objets des connoissances humaines : mais n’avons-nous pas sur l’Histoire Naturelle le bel ouvrage de M. le Comte de Buffon, & une foule de livres excellens sur la Physique, la Jurisprudence, la Médecine, la Chirurgie, l’Anatomie, l’Art Militaire, la Théologie, &c. &c. ? & peut-on espérer de faire mieux en ce genre que ce qui est fait sur tous ces objets ? Supposons toutefois que ce projet fût praticable, quelle utilité réelle en résulteroit-il pour le public ? Il auroit un plus grand nombre de traités didactiques sur chaque science ; mais ces ouvrages ne pourtoient point remplacer, même en leur supposant des tables bien faites, l’utilité, l’avantage, & la commodité des dictionnaires, qui, par le plan sur lequel ils sont exécutés dans cette nouvelle Encyclopédie, comme on le détaillera

  1. Et cependant M. Macquer, dans sa nouvelle édition , convient lui-même que son ouvrage n’est réellement point un Dictionnaire : la grande longueur de beaucoup d’articles le fait rentrer, en grande partie, dans la classe des Traités, dont les objets font suivis & liés les uns aux autres.

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