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avec ; la plus grande correction sur des cartons plus ou moins épais, plus ou moins étendus, relativement à l’usage que l’Artiste a besoin d’en faire. Cet usage a été primitivement destiné à la Peinture à fresque. Il est nécessaire de donner quelques notions de cette manière de peindre, pour faire comprendre le principal usage des cartons.

Pour exécuter la fresque, on enduit d’un mortier fait de chaux & de sable, la voûte ou la muraille que l’on veut enrichir d’une Peinture. Lorsque cet enduit est assez ferme pour ne pas céder au doigt qu’on y applique à dessein de connoître sa consistance, & qu’il conserve cependant de la fraîcheur & de l’humidité ; l’on applique le carton, sur lequel se trouve dessiné & découpé très-correctement le trait d’une figure ou d’un objet qu’on a le projet de peindre. On trace avec une pointe de bois ou d’y voire aiguisée en forme de crayon, le contour de la figure en suivant exactement les bords du carton. Ce trait légérement enfoncé dans l’enduit, lorsqu’il est frais, guide le Peintre qui ne pourroit, comme sur la toile, dessiner avec le crayon ce qu’il ce qu’il doit peindre.

Le carton découpé n’est propre que pour une figure ou un seul objet ; mais lorsqu’il s’agit de tracer une composition entière, on pique le trait de tous les objets qui se trouvent dessinés sur le carton, alors on passe, en appuyant, un sachet rempli de charbon mis en poudre, on fait ensorte que la poudre passe au travers des trous d’épingles qui marquent tous les contours de ces objets, & le trait de ces contours se trouve dessiné sur l’enduit frais qui est préparé pour recevoir la couleur.

Cette opération se fait par deux raisons. J’ai parlé de la première, c’est-à-dire, de l’impossibilité qu’il y auroit de dessiner sur un enduit frais & humide. L’autre est la promptitude avec laquelle il est indispensable de peindre sur l’enduit, pour qu’avant qu’il soit sec, la couleur qu’on y applique puisse s’y incorporer en y pénétrant. Par ces raisons, il est essentiel de tracer les objets de manière que le trait s’y conserve, parce que les opérations ne peuvent supporter de retardement, & qu’on n’a pas le tems de revenir à plusieurs fois. Aussi des deux manières d’employer les cartonsdont je viens de parler, celle des cartons découpés a été le plus en usage dans la Peinture à fresque, parce que cette petite trace que l’on forme, en suivant les contours du carton, quoique très-légérement approfondie, reste plus inaltérable & se retrouve aux yeux de l’Artiste qui n’a point à craindre de la perdre ou de l’altérer.

CATALOGUE DE TABLEAUX, DESSINS, ESTAMPES, &c. Il est assez difficile aux


hommes raisonnables de s’empêcher de sourire, lorsqu’ils jettent les yeux sur l’importance que la vanité ou l’intérêt mettent aujourd’hui à la possession des objets de luxe ou de ceux que le luxe s’approprie. Tel homme riche & ennuyé, dépourvu de connoissances & tourmenté par l’oisiveté accumule des Tableaux, des Dessins, des Estampes, & bientôt lassé du plaisir qu’il en attendoit, s’en fait un de se procurer, par sa prodigalité à cet égard, un inventaire dont on parlera, & de préparer un Catalogue qui parcourra l’Europe, & y portera son nom, fait pour être ignoré.

Depuis que les productions des Beaux-Arts sont des objets de faste pour une partie de ceux qui les achètent, elles ont dû devenir de plus en plus objets de spéculations & de charlataneries mercantiles pour ceux qui en sont commerce. Les Catalogues, les descriptions, les éloges des Ouvrages qu’on expose en vente, & auxquels on joint après les ventes le détail des prix de chaque objet, sont composés la plupart de manière à exciter les désirs, à reveiller l’émulation des Amateurs qui ont pour but la gloire de l’emporter les uns sur les autres ; & si ces étalages de descriptions empoulées, qui inondent le Public sous le nom de catalogues, n’étoient pas condamnées à un prompt oubli, s’il s’en conservoit quelques exemplaires, & que les hommes devinssent un jour plus raisonnables qu’ils ne sont, on pourroit craindre qu’ils ne jugeassent trop défavorablement de notre siècle, à moins que par une juste compensation, ils n’opposassent a nos futilités, & je dirai même à nos désires, les connoissances réelles & estimables dont nous avons avancé les progrès, & les résultats incontestables de travaux heureux qu’ont produit nos sciences & nos Arts. Au moins est-il juste d’observer que la plus grande partie des ridicules, qu’on attribue à la nation entière, est restreinte dans quelques classes d’hommes peu instruits, quoiqu’ils aient le moyens de l’être, & de désœuvrés, pour qui les ridicules sont moins fâcheux & bien moins pénibles à supporter que le vuide de leurs facultés & les ennuis de leurs jours oisifs. Ces classes, devenues à la vérité trop nombreuses, existent dans nos Capitales, où elles se multiplient en proportion du nombre des habitans & de la richesse. Pour revenir aux inconvéniens des énoncés ridicules & peu sincères qu’on prodigue si souvent aujourd’hui sous le nom de catalogues, un de leurs effets pernicieux par rapport aux Arts & à la Nation, est d’accoutumer à priser généralement les ouvrages vantés d’après des considérations de luxe, de mode, par la seule rareté des objets & sur-tout, beaucoup moins d’après les beautés réelles de l’Art & de la nature, que d’après ce qu’on nomme agréments, la plupart arbitraires ou sujets aux caprices des modes & de des conventions.