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iv AVERTISSEMENT.


approuvés ou pratiqués, de connoître une partie de leurs procédés, de tenir quelques anneaux qui peuvent m'aider à suivre la chaîne entière des arts: j'en ai pratiqué un seul par état; mais j'ai fréquenté, j'ai entendu, j'ai vu pratiquer des artistes dans tous les genres, & j'ai pu me rendre leur théorie familière.

Ce ne sera pas moi qui parlerai; ce seront des artistes célèbres qui; par ma voix, parleront aux artistes. Tous ceux qui ont écrit sur leur art, depuis Léonard de Vinci, jusqu'à nos jours, seront consultés; je rapporterai même souvent des passages de leurs ouvrages. Les connoissances que j'ai acquises me serviront seulement à distinguer dans leurs opinions, ce qui n’est que le sentiment particulier de l'homme, de ce qui peut être regardé comme principe de l'art. Je ne négligerai pas non plus de relire les écrits de quelques amateurs célèbres, tels que Félibien & de Piles, parce qu'ils n'ont été souvent que les échos d'artistes respectables. C'est encore ici que les connoissances que j'ai prises des arts ne me seront pas inutiles; elles m'aideront à ne pas confondre quelques opinions au moins douteuses de ces deux amateurs, avec les principes solides que Félibien devoit à son commerce avec le Poussin, & de Piles à ses liaisons avec Dufresnoy.

« On a jugé que le goût de M. Watelet étoit trop timide, & ses vues rétrécies par des préventions nationales. » C’est ainsi que s'exprime le premier homme de lettres qui a répandu des fleurs sur sa tombe[1]. Je ne dissimulerai pas que ce reproche me semble ne pas manquer de fondement. L'estimable amateur avoit vu l'antique & l'Italie; mais on apperçoit qu'il n'avoit pas une estime assez profondément sentie pour Rome & pour l'antique. Ce n'est pas lui qu'il faut accuser, mais le tems où il avoit pris naissance. Les impressions reçues dans la jeunesse sont ineffaçables, &, dans la jeunesse de M. Watelet, notre école avoit plus que jamais le défaut d'être purement françoise: défaut, sans doute,

  1. M. Suard, dans l’article de Nécrologie déjà cité.