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quatre à cinq paires de bœufs, selon que le terrain oppose plus ou moíns de difficultés : des personnes qui marchent derrière, ramassent toutes les racines coupées. Le terrain étant labouré dans toute sa longueur, on le laboure en largeur, afin de croiser les premières raies, & de détacher les racines qui auroient pu rester entre les sillons du premier labour. En automne ou au printems, on fait les autres cultures à l’ordinaire, avec une forte charrue à soc.

Il faut comprendre sous le nom de terres en friche les prés, les luzernes, les sainfoins, les trèfles, & généralement toutes les terres couvertes d'herbes, qui n'ont point été labourées depuis long-tems. Pour les réduire en état de culture ordinaire, afin de les ensemencer, il ne suffit pas de couper le gazon, il faut encore le renverser sans dessus dessous, afin qu'il puisse bonifier le terrain. La charrue ordinaire paroît peu propre à produire cet effet, quand même elle seroit assez forte pour surmonter sans se briser les obstacles qu'elle rencontre dans un sol si difficile à ouvrir. Pour se dispenser de la culture à la bêche, longue & dispendieuse, Duhamel conseille d'employer la charrue à coûtres sans socs en la faisant passer deux fois en croisant à la seconde les premières raies. Une forte charrue entre ensuite ; aisément ; elle renverse, sans beaucoup de peines, les pièces de gazons coupées par les coutres. Ce labour, fait en automne, les mottes sont brisées par la gelée, & la terre est en état d'être ensemencée au printems. Après la récolte des grains de.ventôse, on donne plusieurs labours, afin de préparer la terre à recevoir du froment.

Duhamel observe, qu'il n'est pas toujours avantageux de semer du froment la même année qu'on a réduit une prairie en état de culture réglée : si la terre est d'une très-bonne qualité, il vaut mieux attendre la troisième année, parce que le froment, qui demande plus de substance, que les autres grains, se trouvant dans un sol neuf capable de lui en fournir beaucoup, pousseroit si considérablement en herbe, qu'il verserait. Il remarque encore que cette plante étant plus vivace que celle des autres grains, resteroit plus long-tems verte, le grain mûriroit par conséquent trop-tard : pour éviter cet inconvénient, il y fait semer de l’avoine, des légumes ou du chanvre pendant les deux premières années.

A l’égard des prairies maigres, remplies de mousse, situées sur un mauvais sol, des terres qui ont été en jachère pendant plusieurs.années, parce qu'elles sont peu fertiles, & dont la surface est couverte de gazons, Duhamel propose de les écobuer, pour les brûler, afin que les cendres du gazon & des plantes fertilisent le terrain. Cette opération, qu'il regarde comme très-utile quand elle est faite à propos, peut


être nuisible, si on ne la fait pas avec beaucoup de précautions. Lorsque le feu est trop vif, il calcine la terre, consume les sucs propres à la végétation ; elle n’est plus alors qu’un sable stérile, ou une brique réduite en poussière, incapable de fertiliser.

Quant aux terres humides & pierreuses, lorsqu'une pièce de terre est humide, parce qu'elle a un fond de glaise ou d’argile, qui ne permet pas à l’eau de se filtrer, ou qu'elle est située de façon à recevoir les eaux de champs limitrophes, elle forme une espèce de marécage qui produit toutes sortes de plantes aquatiques, qu'on a bien de la peine à détruire entièrement. Duhamel exige qu'auparavant de labourer un terrain de cette espèce, on procure un écoulement à l’eau.

Lorsqu'un terrain a de la pente, il est tres-aisé de le procurer, & chacun sait que les fossés en sont le moyen ; & la terre qu'on en retire à la longue devient un excellent engrais.

Après cette opération, les joncs & toutes les plantes aquatiques, privées de leur élément, se dessèchent bien visiblement. Lorsque le terrain est bien desséché, l’auteur conseille de l'écobuer pour le brûler, ou d'y passer la charrue à coutres sans socs avant de lui donner un labour de culture pour le disposes à être ensemencé.

Si le sol est d'une qualité à retenir l'eau, & qu'il ne soit marécageuxque pour cette raison, il ne suffit pas de l’entourer de fossés, il faut, encore en creuser quelques-uns de distance en distance dans l'étendue du terrain, en les faisant aboutir à celui qui est le plus bas. Quand on veut que la pièce de terre ne soit point coupée, par tous ces fossés, il faut les combler avec des cailloux, en remettant ensuite la terre par-dessus ; mais alors on sera obligé de les rouvrir tous les cinq ou six ans, parce que la terre qui sera placée dans tous les vides que laissoient entre eux les cailloux, ne permettra plus à l’eau de s'écouler. Après toutes ces opérations, l’on réduit aisément ces sortes de terrains en état de culture ordinaire, si toutefois le champ vaut la dêpense nécessaire pour son dessèchement.

Exploiter une terre, c'est la mettre en état, en travaillant, de donner les productions dont elle est capable. Pour cet effet on laboure, on met des engrais, l’on sème, on cultive. Duhamel ne croit pas que les labours tiennent lieu d'engrais dans toutes les circonstances

Selon Duhamel, l’objet du cultivateur doit être de rendre ses terres fertiles, afin que leurs productions, le dédommagent de ses soins & de sa dépense. Il ne connaît que deux moyens capables de produire cet effet : l’un par des labours, l'autre par les engrais. Quoiqu'il soit persuadé


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