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sera soutenue sur trois piliers de bois de chêne ou de pierres, ou de briques, à environ un pied & demi de terre. Elle sera terminée sur le devant par une avance en forme de bec, de trois à quatre pouces de long, dans le milieu de laquelle sera pratiquée une rigole en pente douce sur le devant, pour faciliter l’écoulement de l’eau, & pour servir de chemin aux abeilles pour entrer dans la ruche.

Avantage des nouvelles ruches sur les anciennes.

Exposer les inconvéniens des anciennes ruches, auxquels les nouvelles ne sont point sujettes, c’est déjà montrer l’avantage de ces dernières. Par la forme des premières, il est impossible de bien distinguer tous les gâteaux de cire vieille qu’il seroit à propos de retrancher, parce qu’elle se gâte, répand une mauvaise odeur, & fait mourir les abeilles. Il est très-difficile de ne pas enlever quelques gâteaux de cire neuve, qui contiennent ordinairement plus de couvain. Si l’on arrache de la cire neuve, dans laquelle il n’y ait pas encore de couvain déposé, il faudra que les abeilles emploient, à réparer le désastre, le tems qu’elles auroient occupé à augmenter le nombre des alvéoles. Lorsque l’année est favorable, & que la ruche est bien peuplée, faute de trouver de l’espace dans la ruche même, elles font un ouvrage perdu en travaillant en dehors. On renverse les ruches ordinaires pour en ôter la cire & le miel ; il reste des débris de cire, le miel coule, les guêpes le sentent, il peut en arriver de tous côtés pour s’approprier le miel et les débris de cette cire, & il en résulte le pillage. Comme on travaille un peu à tâtons, si l’instrument dont on se sert tombe sur l’alvéole de la reine, on ne peut espérer d’essaim pour l’année, trop heureux si la ruche ne périt pas toute entière. L’expérience apprend que, dans ces sortes de ruches, il est presque impossible de garantir les abeilles des souris, des vers, des papillons & de tous les insectes qui font souvent périr une ruche. On ne peut pas plus entretenir les abeilles dans la grande propreté qu’elles aiment :

At neque munditiae magnas par cura per urbes
Privatasque domos : nil fordis in oedibus.
Praed. Rust. L. 24

Comme les ruches sont ordinairement établies sur de longues planches, lorsqu’on visite les abeilles, l’ébranlement d’une seule ruche trouble toutes les autres. On ne parle pas de ceux qui tuent les abeilles pour s’emparer de leur dépouille ; c’est le comble de l’ignorance.

Les nouvelles ruches ne sont pas exposées à cet inconvénient. Si l’on a recueilli un essaim


foible, on le laisse dans une hausse seule qu’on place sous un autre essaim pareillement foible. Quand ces deux essaims seroient soumis à trois semaines ou un mois de distance l’un de l’autre, ils se réuniront & en formeront un bon qui ne craindra point l’hiver. Pour l’assurer davantage, on peut arroser les deux avec un bon verre de miel & autant de vin cuit, refroidis ensemble, assez liquides pour que le plus grand nombre des abeilles en soit mouillé ; ensuite on scelle les jointures des hausses tout autour avec de la bouze de vache, & on les fume un peu.

Pour enlever le miel & la cire, après avoir ôté les fonds supérieurs qui couvrent la ruche, on détache très-doucement la hausse de dessus ; on replace le fond sur la hausse de laquelle on vient de détacher celle qu’on enlève, on l’emporte à l’ombre, loin du rucher, ou chez soi, pour que les abeilles ne la fuient pas ; on chasse avec un peu de fumée celles qui pourroient y être restées ; on l’examine ensuite à son aise dans le cours de la journée ; on s’approprie le tout ou une partie de la récolte qu’elle contient. S’il y a du couvain, on l’y laisse, & le soir on rapporte cette hausse, qu’on met au bas de la ruche dans la même position qu’elle étoit en haut. Il est facile d’enlever ainsi & de visiter successivement toutes les hausses les unes après les autres. Si, dans quelqu’une, il se trouve de la vieille cire ou de la moisissure, ou de la vieille poussière de fleurs, on la nettoie : s’il s’en trouvoit sur la tablette ou sur les fonds, on les lave avec de l’urine fraîche, & la ruche est toujours en bon état. Pour remettre les hausses dans la même situation où on les a prises (ce qui est essentiel), on y trace une ligne rouge ou noire, qui soit assez sensible pour pouvoir les replacer précisément comme elles étoient.

Soit par l’ouverture quarrée qui est au centrs de la tablette, soit par l’inspection des hausses, il est facile de s’assurer s’il faut donner une nouvelle hausse, ou s’il est besoin de donner de la nourriture aux abeilles. Comme il ne faut pas être trop avide de miel, on est à portée de savoir la quantité qu’on en peut ôter, & celle qu’on en doit laisser pour que la ruche soit toujours dans l’abondance. Enfin, on est à même de prendre toutes les précautions nécessaires, sans crainte de se tromper.

Position des ruches ; leurs visites ; nourriture des abeilles.

Il n’est pas indifférent de placer les ruches dans un lieu quelconque, sans choix et sans distinction. La position qui leur convient le mieux, est la proximité d’une habitation, afin d’y veiller plus facilement. Le soleil de sept heures du matin