Page:Encyclopédie méthodique - Arts aratoires, T01.djvu/183

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
POT POT 167


sommation, ou pour en faire vendre la plus grande partie. Dans ce cas, qu'il dispose donc le sol de sonjardin en conséquence ; voici une loi générale, capable de servir de base à la culture de tous les légumes en général. L'inspection des racines décide la nature & la profondeur du sol qui leur convient. Les plantes potagères sont ou à racines fibreuses, ou à racines pivotantes. Il est clair que les premières n'exigent pas un grand fonds de terre, puisque leurs racines ne s'enfoncent qu'à cinq ou six pouces de profondeur. Les secondes, au contraire, demandent une terre qui ait du fond, & une terre un peu tenace. Sans l'une & l'autre de ces conditions, elles ne pivoteront jamais bien. Or, si le terrain n'est pas préparé par les mains de la nature, il faut le faire ou renoncer à une bonne culture. Afin de diminuer les frais, le propriétaire destinera une partie de son terrain aux plantes à racines fibreuses, & l'autre aux racines pivotantes, & lui donnera par le travail ou par le mélange des terres, la profondeur convenable. Il est aisé, dans le fond d'un cabinet, de prescrire de pareilles règles ; il n'en est pas ainsi lorsqu'il s'agit de les mettre en pratique ; le travail est long, pénible, très-dispendieux, & souvent trop au-dessus des moyens du cultivateur ordinaire : celui qui se trouvera dans ce cas, doit se résoudre à ne défoncer ou à ne mélanger chaque année qu'une étendue proportionnée à ses facultés ; s'il emprunte pour accélérer l'opération, c'est folie.

Il n'est pas possible d'attendre aucun succès, si on rencontre une terre argilleuse ; la préparation qu'elle demande, coûteroit plus que l'achat du sol. La terre rougeâtre que le cultivateur appelle aigre, est dans le même cas ; elle est bonne, tout au plus, à la culture des navets. Un des grands défauts de la terre pour les jardins, est d'être trop forte, trop compacte, trop liante ; elle retient l’eau après les pluies, se serre, s'aglutine & se crevasse par la sécheresse. Lorsque le local òu la nécessité contraignent à la travailler, la seule ressource consiste à y transporter beaucoup de sable fin, des cendres, de la chaux, de la marne, de grands amas de feuilles, & toutes sortes d'herbes, afin d'en diviser les pores. Malgré cela, en supposant même tous ces objets réunis & transportes à peu de frais, ce ne sera qu'après la troisième ou quatrième année que l'on commence réellement à jouir du fruit de ses dépenses & de ses travaux.

Après avoir reconnu la qualité de la couche supérieure jusqu'à une certaine profondeur, on doit s'assurer de la valeur de la couche inférieure. Si celle-ci, par exemple, est sabloneuse, elle absorbe promptement l’eau de la supérieure & le jardin exigera de plus fréquens arrosemens. Si au contraire elle est argilleuse, il ne sera pas


nécessaire d'arroser autant pendants l'été ; irais dans la saison des pluies, il est à craindre que les plantes ne pourrissent. Ces attentions preliminaires sont indispensables avant de fixer l'emplacement d'un jardin. De ces généralités passons à la pratique.

Long-tems avant de tracer le plan d'un jardin, on doit avoir examiné mûrement les avantages & les inconvéniens du local, la position de l’eau, la facilité dans sa distribution, la commodité pour les charrois, le transport commode & le lieu du dépôt des engrais ; enfin, la position où seront construits le logement du jardinier, le hangard destiné à mettre à couvert les instrumens aratoires, & le terrain destiné au placement des couches, des châssis, des serres. &c. suivant l'objet qu'on se propose.

Le plan & le local une fois décidés, & le jardin tracé, il ne s'agit plus que de défoncer le sol, afin que dans la suite on soit en état de le travailler par-tout également. Si un particulier aisé entreprend la confection d'un jardin, il doit ouvrir des allées de communication entre chaque grands carreaux ; celle du milieu & qui correspond à l’entrée, sera la plus large. Le jardin de l’humble maraîcher n'a pas besoin de cet agrément ; son but capital est de profiter de plus de superficie qu'il est possible.

Les allées tracées, on enlèvera la couche supérieure de terre, & on la mettra en réserve, suivant que le terrain total sera pierreux ; on excavera les allées, afin de recevoir les pierres & les cailloux qui se présenteront lors de la fouille générale.

Le grand point, le point essentiel est de si bien prendre ses précautions, qu'on ne soit jamais obligé, de manier ou transporter deux fois la même terre.

Si le sol est marécageux ou simplement humide, ces pierrailles deviendront de la plus grande utilité, & serviront à établir des aqueducs, ou filtres, ou écouloirs souterrains, qui transporteront les eaux au-dehors de l'enceinte.

La fouille du total de l’emplacement doit être de trois pieds de profondeur. Si on veut économiser, on donnera ce travail à l’entreprise, & à tant par toise quarrée de superficie sur la profondeur convenue. Mais pour ne pas conclure un marché en dupe, on commencera à faire fouiller, à journées d'hommes, une ou deux toises, & on jugera ainsi, toute circonstance égale, quelle doit être la dépense générale, & combien on doit payer par toise. Si on désire connoître bien particulièrement le prix, il faut que le propriétaire ne quitte pas un seul moment ses travailleurs, & qu'il calcule ensuite à com-