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élévation seroit une défectuosité encore plus dangereuse que la trop grande largeur, puisque l'ennemi venant à avoisiner le pied du glacis, le découvriroit presque entièrement de ses tranchées, & par conséquent n'auroit pas grande peine à en chasser l'assiégé ; ceci se connoîtra facilement par le profil; & cela est d'autant plus possible, que le canon dégrade toujours la tête du parapet, ce qui en diminue la hauteur, & qu'il peut s'élever de 2, 3 à 4 pieds au-dessus du niveau de la campagne, en déhaussant le parapet de ses sapes, un peu plus que d'ordinaire, & y joignant plusieurs banquettes, comme je viens de l'expliquer, pour faire feu dans le chemin-couvert. Il obligeroit par ce moyen l'assiégé de l'abandonner, & lui en rendroit ensuite le logement aisé. Mais pour éviter ce défaut, il faut lui donner 7 pieds & demi aux angles saillants, & 6 & demi aux rentrants qui ne sont pas si exposés, non compris un demi-pied de pente qu'il faut donner depuis la banquette jusqu'au bord de la contrescarpe, pour 1 écoulement des eaux de pluie. De cette manière, l'ennemi ne pourra découvrir le terre-plein du chemin couvert, que lorsqu'il sera très proche de la palissade, à moins que le glacis n'en soit extraordinairement plat, défaut qu'il faut éviter autant qu'il est possible, ainsi que je le détaillerai par la suite.

De la banquette.

Pour que le soldat puisse tirer par-dessus le parapet du chemin-couvert, on lui joindra une banquette de 3 pieds de largeur, non compris celle qu'occupe la palissade, & de 4 pieds & demi au-dessous du sommet. On la termine en rampe du côté de la contrescarpe sur une pente double de la hauteur, afin qu'elle soit aisée à monter. On a pratiqué quelquefois jusqu'à deux ou trois banquettes l'une dessus l'autre pour faciliter la montée, mais une rampe telle que je la propose, est aussi commode que ces degrés qui demandent de l'assujettissement, & qui, après quelque-temps se mettent d'eux-mêmes en talut.

De la palissade du chemin-couvert.

On a planté différemment les palissades dans les chemins-couverts ; mais de toutes les manières qui peuvent avoir été mises en usage, on s'est conformé à celles qui suit, proposée par M. le Maréchal de Vauban.

Méthode de planter les palissades proposée par M. le Maréchal de Vauban, & approuvée du Roi.

Les différents sentiments touchant la manière de planter les palissades dans les chemins couverts, ont donné occasion d'examiner l'usage qu'on en a fait à plusieurs sièges que les troupes du roi ont


soutenu pendant les guerres précédentes, & en dernier lieu à celui de Keyferwert, pour déterminer celle qui pourroit être la meilleure. M. de Vauban a jugé que la manière qu'on suit depuis plusieurs années, en plantant les palissades au pied du parapet du chemin-couvert, est la plus sure de toutes celles qui se sont pratiquées ci-devant, même de celles qui ont été proposées. Mais son avis est, qu'en temps de siège, on en plante une seconde sur la première banquette du chemin-couvert dans les places-d'armes des angles rentrants seulement, ne voyant pas qu'on puisse soutenir de pied ferme les grands angles saillants, à moins que de surprendre tout-à-fait le feu des remparts, qui est celui qui fait le plus d'effet.

M. de Vauban juge aussi que pour remédier aux défauts de la palissade plantée au pied du parapet du chemin-couvert, il est nécessaire de diminuer de 9 pouces la hauteur qu'on avoit accoutumé de lui donner au-dessus du sommet du parapet, de l'aiguiser de plus loin, de l'éloigner de 6 pouces du pied du parapet, de la planter plus claire; & pour suppléer au défaut de la plus grande distance des pieux, & empêcher qu'on ne puisse mettre le pied entre deux pour sauter par-dessus, de mettre le linteau plus bas, & de clouer entre deux un clou qui sortira de 3 pouces, & occupera précisément le milieu du vuide.

Je prétends que cette haute palissade ainsi posée empêchera l'entrée du chemin-couvert à l'ennemi ; qu'elle ne fera point exposée à être rompue par le canon, qui ne la pourra au plus que pincer par l'extrémité de sa pointe ; que l'ennemi ne la pourra sauter, & encore moins la couper ; qu'elle n'empêchera pas qu'on ne pose les sacs-à-terre à découvert avant que l'ennemi soit à portée de l'empêcher ; & qu'on pourra ensuite faire passer quelques hommes de distance en distance entre deux, c'est-à-dire entre le parapet & la palissade, pour raccommoder celles qui feront dérangées, les mettre en place, & même relever les terres éboulées ; qu'enfin les pointes de cette palissade se trouvant fort écartées, le soldat pourra biaiser son fusil à droite & à gauche autant qu'il fera nécessaire.

L'intention du roi est que les ingénieurs & les autres personnes qui pourront être proposées à la conduite des ouvrages de fortifications, s'y conformeront à l'avenir lorsqu'il faudra palissader à neuf les chemins-couverts des places, ou remettre les palissades devant les parties où les anciennes ne font plus en état de servir. Fait à Paris le 15 Septembre 1700. Signé de Vauban.

On a cependant retranché les pointes de fer plantées dans le linteau, parce qu'elles contribuent beaucoup à le pourrir, & qu'on ne peut pas empêcher qu'on les vole ensuite. De sorte qu'on les approche davantage, ne laissant que deux pouces & demi de distance entre elles, pour servir de créneau au soldat pour passer son mous-


Art militaire. Tome II.

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