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manière de traduire ce mot en latin, qui fût autorisée par quelque passage péremptoire. Les mots loculus, loculi, susceptibles de beaucoup de significations, qui expriment généra’ement l’idée d’un endroit à placer séparément divers objets, l’idée de caisse, d’étui, etc., avoient paru les plus propres à rendre l’idée de niche.

Au mot Niche nous avons annoncé, sans en rapporter les preuves, que Visconti avoit commenté, dans ses Monumenti Gabini, une inscription très-authentique trouvée dans les ruines de Gabies (voyez ce mot), où le mot zotheca signifioit indubitablement ce que nous appelons niche, en tant que réceptacle d’une statue, dans les ouvrages d’architecture. Nous allons ici faire connoître cette inscription, et rapporter sur ce mot le commentaire du célèbre antiquaire.

A. PLAVTIVS. &c..... TEMPLVM CVM
SIGNO AEREO EFFIGIE VENERIS ITEM
SIGNIS AEREIS N. IIII. DEPOSITIS IN
ZOTHECIS ET BALBIS AEREIS ET
ARAM AEREAM.

Le mot zotheca, qu’on lit dans cette inscription au datif pluriel, n’a été expliqué et traduit jusqu’à présent, que comme une sorte de synonyme des mots français petit réduit, cabinet, alcove, c’est-à-dire comme le réceptacle qui peut renfermer un être vivant, d’après l’interprétation ci-dessus donnée du mot grec ξωον, zoon, ou encore en donnant au mot ξωον la simple signification d’animal, comme une cage à contenir des animaux, et même un garde-manger.

Toutefois, comme nous l’avons déjà dit plus haut, et comme Visconti le confirme surabon-damment dans le commentaire de notre inscription, par plusieurs passages des écrivains grecs, le mot ξωον, dans un assez grand nombre de ses composés, exprima l’idée, non-seulement d’un être vivnt, mais de l’image, soit peinte, soit sculptée, soit gravée, de l’homme.

Dès lors, le mot zotheca, pris dans le sens propre et spécial du mot theca, composé avec ξωον, a dû exprimer l’idée d’un réceptacle à figures, d’un local propre à recevoir, non pas un homme vivant, mais son image ou sa statue. On peut croire que l’idée que donne le mot armoire, par lequel on a souvent traduit theca, a pu et dû même conduire à donner le même nom, à ce que nous désignons aujourd’hui par le mot niche. Effectivement, un très-grand nombre d’armoires, destinées à la conservation d’une multitude d’objets, s’offrent encore maintenant à nous, dans tous les bâtimens, comme des renfoncemens, pratiqués dans les murs, et c’est à l’instar de cette pratique très-usuelle, qu’on dut en faire de mobiles et de portatives. Toute armoire, de quelque genre qu’elle


soit, emporte avec elle l’idée de clôture au moyen des battans qu’on ferme.

Mais pourquoi n’en auroit-il pas été de même dans les plus anciens temples, aux époques surtout où les simulacres divins étoient ordinairement faits en bois, et habillés d’étoffes naturelles ou réelles? Pourquoi ces figures, et quelques autres de matières précieuses, n’auroient-elles pas été renfermées dans de véritables niches, ou adhérentes aux murs, ou mobiles, et soustraites à la vue journalière par des portes ou des battans d’armoires, ainsi qu’on le voit encore pratiqué en quelques pays, à l’égard de certaines images de dévotion?

Si très-probablement cette pratique, qui tient à l’instinct religieux, qui, chez les Modernes, avoit lieu surtout dans ce qu’on appeloit ici jadis, et qu’on appelle encore ailleurs, les trésors ; si, dis-je, cette pratique fut usuelle, il est constant que le mot theca, lieu de conservation, fut très-naturellement donné à ces réceptacles d’images révérées et de statues précieuses. Dès-lors, le même mot dut s’appliquer, ou en même temps, ou postérieurement, à tout local en renfoncement des murs, où on plaça les statues de tout genre, non plus closes, mais à découvert, comme nous le voyons et le pratiquons dans ce que nous appelons des niches.

On voit dès-lors comment la première acception du mot zotheca, dans le sens où Pline le jeune l’a employé, pour désigner le petit réduit en façon d’alcove vitrée, qui étoit un annexe du cubiculum dont il parle, correspond, par une analogie fort naturelle, à la seconde signification.

Par première acception, nous entendons simplement parler de l’ordre des deux notions dans cet article. Maintenant, lequel des deux emplois du mot, soit dans les pratiques usuelles ou domestiques de la vie, soit dans les usages religieux ou relatifs aux statues, aura précédé l’autre ? C’est ce qui nous semble aussi difficile qu’inutile à constater. Suffit qu’il y ait entre les deux acceptions des rapports communs, pour qu’on puisse en justifier l’emploi dans un sens comme dans l’autre. Si l’architecture antique n’avoit pas employé des niches dans ses bâtimens de tout genre, si même cette pratique n’étoit pas constatée par une si grande quantité d’exemples, qu’il est inutile d’en faire mention, on pourroit, ou nier ou révoquer en doute l’existence d’un mot, pour exprimer un objet qui ne nous seroit pas connu.

Mais nous avons fait voir au mot NICHE que les Anciens mirent en œuvre toutes les formes de niches connues. Ils durent donc avoir, pour désigner un objet si commun, un mot usual.

Comment maintenant se refuseroit-on à voir, dans l’inscription que nous avons rapportée, la véritable dénomination de cet objet par le mot