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damentale disparoît, et il ne reste plus que le caprice.

Dans l’art de l’architecture, considéré abstractivement, il faut bien se demander quelle est la qualité principale qui doit dominer toutes les autres. Le simple bon sens répondra partout que c’est l’utile. Sans aucun doute, l’art qui a pour objet de satisfaire aux besoins de l’homme en société, doit mettre en tête de ses obligations, celle de l’utilité. Cette utilité ne doit pas cependant se réduire au pur matériel. Les besoins de l’homme en société ne reposent pas uniquement sur ce qui se rapporte au corps ; il y a aussi le besoin de satisfaire la raison, l’esprit et le goût ; ce qui établit plus d’une sorte d’utile. Ainsi la solidité, condition première de toute construction et inséparable de l’utile, doit être le principal. Mais cette même solidité sera encore la source la plus féconde d’une autre qualité, l’agréable, qui cesseroit de l’être, s’il cessoit d’émaner de l’utile, et de s’y subordonner. C’est précisément de cette subordination que résulte l’effet qu’il produit. Si l’agréable (et par là j’entends les ornemens accessoires) n’étoit soumis à aucune loi, qui ne voit que ce seroit chose si facile, et dès-lors si vulgaire, que l’on n’en seroit plus affecté ? Ce qui nous plaît en ce genre, nous plaît précisément parce qu’il nous semble qu’il y a quelque chose de rare et de difficile, à faire sortir l’agrément d’un principe qui paroît lui être opposé. Supprimez cette condition de la suprématie de la qualité principale de l’utile ou de la solidité, et vous dissolvez le lien d’unité morale, dans ce qui compose l’essence de l’architecture comme art.

Si l’on considère l’architecture sous un rapport moins abstrait, c’est-à-dire, dans l’ouvrage positif de l’artiste, ou dans chaque genre d’édifice, on trouvera de même que le mérite de chacun résultera, quant à sa composition et à son exécution, de ce même principe d’unité, d’ou naît l’obligation de bien reconnoître, et de faire bien distinguer ce qui doit être le point principal, auquel se coordonnent les accessoires.

Ainsi il y aura, pour chaque genre d’édifice, une forme générale, indiquée par la nature de sa destination, qui en est, si l’on peut dire, la forme typique. Là résidera, pour la conception de l’ensemble, leprincipal point auquel devront correspondre et s’assortir tous les détails.

Tout édifice a, selon la nature de son emploi, une manière d’être, condition première imposée par le besoin qui le fait être. C’est ce qui devient le régulateur, et de la masse générale et des accessoires qu’elle comportera.

Pour descendre aux notions plus pratiques de la disposition des édifices, on dira que dans chacun, il doit se trouver un corps principal qui en indique le véritable emploi. Dans le plan d’un palais, ce sera une cour d’honneur, et dans son élévation, la partie occupée par le propriétaire.

Il y a dans toute maison, dans toute devanture, ou un étage principal, qui se distingue par plus de grandeur, ou une ordonnance qui le caractérise d’une manière particulière.

L’idée de principal et les notions qui en dérivent, se liant, comme on l’a vu, au principe d’unité dans tous les arts, et surtout dans, l’architecture, elles pourroient donner lieu à des développemens qui en contiendroient la théorie, tout à la fois la plus abstraite et la plus pratique. Mais ces notions trouvant leur place séparée à un trèsgrand nombre d’articles de ce Dictionnaire, nous nous contenterons dans celui-ci, d’avoit fait sentir et toute son importance, et tout ce qu’il renferme d’applications.

PRINCIPE, s. m. On lit dans la plupart des lexiques que l’on appelle ainsi, les règles ou les lois qu’on doit observer dans chaque art.

Il nous semble que le mot principe comporte une autre définition, qui ne permet pas, ni grammaticalement ni théoriquement parlant, d’en faire un pur synonyme de règle ou loi.

Principe (en latin principium) indique, par la formation même du mot, quelque chose ou qui est, ou qui doit être mis en tête, et selon une de ses acceptions, on le prend comme signifiant origine, cause primaire.

Nous croyons donc que dans toute théorie, et surtout dans celle des beaux-arts, il faut appeler principe, non toute règle et toute loi, mais toute vérité générale et fondamentale, d’où découlent d’autres vérités secondaires, toute notion primaire et élémentaire, de laquelle on déduit des notions d’un ordre inférieur, qui lui doivent leur force, leur évidence, et deviennent les règles.

Ainsi, Ne pas faire à autrui ce que l’on ne voudroit pas qu’on nous fit (en morale), Rien n’est venu de rien, rien ne retourne à rien (en physique), ne sont point des règles, mais des principes féconds en conséquences, d’où l’on fait sortir les règles qui régissent la jurisprudence, les notions par lesquelles s’expliquent les opérations de la nature.

Chaque art a sa théorie particulière, laquelle est l’ensemble de ses règles. Or ces règles, pour avoir de l’autorité, ont besoin de reposer sur quelques vérités qui, reconnues de tout le monde, et devenues incontestables, forcent le bon sens de se soumettre aux conséquences qu’une saine logique en tire.

L’architecture, plus que tout autre art, a besoin d’appuyer ses règles sur des principes tels qu’on vient de les définir. Cet art manquant d’un modèle réel et sensible qui force les yeux à faire le rapprochement de l’objet imité avec l’objet imitant, il est tenu d’opérer dans ses œuvres par analogie, plutôt que par action imitative ; c’est-à-dire, comme on l’a répété bien des fois, qu’il imite la nature, non dans son ouvrage, mais dans

Diction. d’Archit. Tome III
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