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l’architecture dans des lieux, disent-ils, où il n’est ni possible ni probable qu’un homme vivant puisse parvenir ou rester. Mais, dans la décoration architecturale, il ne sauroit jamais être question de considérer les figures comme êtres naturels et vivans ; il ne faut les voir que sous le rapport d’imitation, c’est-à-dire, comme statues.

C’est d’après cela qu’on blâmera, et avec raison, l’artiste de donner aux statues que doivent renfermer les niches, des compositions trop pittoresques, des attitudes et des mouvemens qui ambitionnent l’illusion, et qui, faisant sortir la figure des lignes de la niche, la mettent trop en saillie hors des murs ou des paremens.

Il resteroit à parler du judicieux emploi que l’architecte peut faire des niches sous le rapport de la décoration. La niche ainsi considérée, devient sans doute trop souvent (comme on l’a déjà dit) une sorte de lieu commun, un objet parasite dont on remplit le vide des superficies qu’on ne sait point occuper autrement : de-là, dans beaucoup de monumens modernes, ces niches multipliées qui sont restées sans statues, parce qu’effectivement ce n’étoit pas le besoin de statues qui les avoit fait imaginer. Aussi a-t-on déjà remarqué qu’une des meilleures destinations qu’on pût aujourd’hui donner à la sculpture, seroit de remplir toutes les niches vides que présentent nos édifices.

Au nombre des raisons qui plaident en faveur des niches dans l’architecture, il faut compter non-seulement l’heureux effet des statues comme objets décoratifs, mais l’effet plus heureux encore de leur signification, et cet effet résulte de l’analogie des sujets exprimés dans les statues avec la destination de l’édifice que ces sujets désignent et caractérisent. On dénoncera donc comme un abus trop commun dans les projets et dans leur exécution, cette habitude de faire des niches qui n’auront pas de statues, ou de les remplir par des statues qui sont sans rapport aveu la destination du monument.

Si cet effet des statues, qui devroit être la vraie raison de l’emploi des niches, étoit toujours présent à l’esprit de ceux qui font des projets d’architecture, il est probable qu’ils seroient plus économes de niches ; celles-ci, moins prodiguées, acquerroient plus de valeur, surtout si elles ne se présentoient jamais sans les statues pour lesquelles elles sont faites.

On donne aux niches différens noms, selon leur forme, leurs accompagnemens, et aussi selon les parties d’édifices ou les emplacemens qu’elles y occupent. Ainsi l’on appelle :

Niche carrée, celle qui forme dans un mur un renfoncement dont le plan et la fermeture sont quadrangulaires.

Niche ronde, celle qui est cintrée dans sa fermeture et circulaire dans son plan.


Niche rustique, celle dont le bandeau est orné de refends du de bossages.

Niche à cru, celle qui, ne portant sur aucun corps ni massif, prend naissance du rez-de-chaussée, comme sont les deux grandes niches du portique du Panthéon, ou qui repose sans plinthe sur l’appui continu d’une façade.

Niche angulaire, celle qui est prise dans un encoignement, qui, dans l’angle, est fermée par une trompe.

Niche de buste, celle qui consiste ordinairement en un petit renfoncement circulaire.

Niche d’autel, ce le qui occupe la place d’un tableau dans un retable d’autel.

Niches en tabernacle. celles qui sont décorées de chambranles, de colonnes avec frontons, et reposent sur un stylobate.

Niche en tour ronde, cette qui est prise dans le dehors d’un mur circulaire, et dont la fermeture est en saillie. On appelle niche en tour creuse, celle qui fait l’effet contraire de la niche en tour ronde.

Niche, œdicula, zotheca, loculamentum.

Les plus anciennes sont évidemment celles qui sont taillées dans la montagne même, et celles qui leur ont succédé et qu’on voit dans les excavations de la Nubie. La nécessité de faire des figures de ronde bosse fit creuser autour de ces figures nu creux qui servit à les détacher plus ou moins. On fit ces entailles carrées autour de la figure, ainsi qu’on en voit dans les excavations d’Eysenboule, de Gerche-Assan, de Déry, etc. On creusoit aussi de petites niches à l’entrée des fontaines ou des temples, et dans les tombeaux, pour y placer des lampes. Il est si naturel, lorsqu’on a un objet quelconque à placer dans un mur ou sur un rocher, d’y faire une entaille ou ronde ou carrée, que la niche en général est de la plus haute antiquité : mais l’usage d’en faire un ornement propre à l’architecture est bien moins ancien ; car on ne peut donner le nom de niches à ces excavations égyptiennes faites pour réserver les figures plus saillantes que celles qu’on voit sur les obélisques, par exemple, qu’on ne peut appeler niches. Ce sont les Grecs, je crois, qui donnèrent les premiers une proportions aux niches, selon la place qu’elles occupaient, soit à l’extérieur, soit à l’intérieur des édifices. Comme ce sont eux qui firent le plus de statues ronde bosse pour faire partie des édifices, il devint naturel de leur donner une place dans la construction, ce qui donna l’origine de la niche proprement dite ; la proportion de la statue lui donna naturellement une véritable proportion, qui fut cependant assujettie à l’ordre et aux ornemens dont étoient enrichis les édifices.

Les Romains, qui ont beaucoup emprunté des Grecs dans les arts, ont souvent fait un abus de ce genre d’ornement, C’est effectivement dans l’ar-