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une de ces niches il doit y avoir encore des fragmens de statues.

Cette sorte de niche, des plus belles qu’il y ait dans l’antiquité, nous conduit naturellement à faire mention de l’espèce de niches encore plus magnifiques qui ornent l’intérieur du Panthéon, à Rome : elles sont aussi du genre de celles qu’on désigne par le nom de tabernacle (selon Chambray). Leur renfoncement est orné d’un bandeau et accompagné de deux colonnes corinthiennes qui supportent des frontons alternativement circulaires et angulaires. Les colonnes posent sur un stylobate, quoique Desgodets leur donne des piédestaux isolés.

On ne sauroit quitter le Panthéon sans y faire observer les deux grandes niches circulaires en plan et dans leur fermeture, qui sont sous le péristyle, une de chaque côté de la porte, et qui, sans doute, comme leur dimension l’indique, furent destinées à recevoir des statues colossales.

Il seroit aussi long qu’inutile de faire mention de tous les édifices antiques romains où l’on trouve des niches. Plus les statues se seront multipliées à Rome et dans les diverses parties de l’Empire, plus, comme cela est probable, l’usage des niches sera devenu fréquent et général. Ainsi, un des hémicycles du monument appelé le temple de la Paix, à Rome, conserve encore dans sa circonférence intérieure une rangée circulaire de douze niches.

Lorsque l’architecture eut à sa disposition une grande quantité de statues, on en fit un objet de décoration universelle. Les théâtres, les forum, les gymnases, les thermes, les tombeaux et beaucoup d’autres édifices furent ornés d’un nombre de niches proportionné au nombre des statues que le luxe public et celui des particuliers, mais surtout les spoliations de la guerre, avoient singulièrement multipliées.

Le grand usage des statues dut rendre ainsi l’emploi des niches si commun, qu’il arriva sans doute qu’au lieu de faire des niches pour les statues qu’on possédoit, on en sera venu à faire des niches pour les statues à venir. Ainsi, il en aura été de la niche, surtout dans les édifices des derniers siècles de l’Empire, comme nous voyons qu’il en est dans les édifices modernes : elle sera devenue une sorte d’ornement banal, un lieu commun de l’architecture, et les architectes en auront fait sans aucune intention d’y placer des statues.

On est fort porté à le croire en parcourant les ruines des édifices de Palmyre, de Baalbeck et de Spalatro. C’est là qu’on voit des niches de tout genre et de toute forme, placées les unes au-dessus des autres, et, à ce qu’il paroît, plutôt pour la décoration des masses et des superficies, que pour recevoir des statues.

Ainsi, un édifice de Rome, appelé l’Arc de Janus, a tous ses massifs quadrangulaires occupés par deux étages de niches ornées de coquilles dans la partie circulaire d’en haut. Quelques-unes de ces niches, c’est-à dire celles des angles, ne sont que figurées ou feintes, parce qu’effectivement l’épaisseur en cet endroit n’eût pas permis de leur donner la profondeur nécessaire pour recevoir des statues.

On retrouve l’ornement en coquilles dont on vient de parler, au plus grand nombre des niches qui décorent les monumens de Palmyre et de Baalbeck : c’est là aussi, comme à Spalaro, qu’on verra toutes les sortes de variétés que l’abus du luxe commença à introduire dans cette partie de l’architecture. Parmi un grand nombre de niches ornées de colonnes et de frontons avec beaucoup de régularité, il en est aussi dont les frontons n’ont plus de base ; il en est d’autres où les frontons éprouvent des ressauts ; d’autres où le fronton est contourné d’une manière capricieuse. Enfin, il semble que là auroit pris naissance l’usage d’employer arbitrairement et à tout propos les niches, et sans aucun autre but que celui de garnir les superficies, ou de remplir des espaces qui, sans cela, seroient demeurés lisses.

Les divers monumens qu’on vient de citer, en suivant l’ordre des temps, peuvent fournir à l’architecture les exemples et les modèles de toutes les espèces dé niches ; et sans doute ils suffiront pour faire connoître à quel genre de convenance elles doivent être assujetties, selon la nature des édifices, et selon le caractère des ordonnances qui les reçoivent. Ces convenances nous paroissent devoir être assimilées à celles d’après lesquelles se règlent la forme et la décoration des portes et des fenêtres, à quoi les niches peuvent et doivent être comparées, sous toutes sortes de rapports, destinées qu’elles sont à servir souvent de pendans, comme objets décoratifs, aux différentes ouvertures des édifices.

En effet on peut, avec toute raison, considérer la niche comme une ouverture ou un percé pratiqué dans un mur, dans un massif ; et il en est qui le sont effectivement, c’est-à-dire, où l’objet qu’on y place peut être vu de l’un et de l’autre côté. C’est ainsi qu’on prend pour de véritables niches, et ils le sont en réalité, ces percés dans l’arc appelé de Claudius Drusus, aujourd’hui Porta Maggiore, et où étoient placés jadis les trophées dits de Marius. De même, dans bien des cas, des arcades sont des niches percées, comme les niches sont des arcades fermées.

Il fut donc, et il est fort naturel encore de donner aux niches, dans la décoration de l’architecture, les mêmes variétés de caractère, de forme, d’ornemens et d’accompagnemens que l’usage a affectés aux ouvertures des fenêtres et des portes.

Ainsi, il y a des niches quadrangulaires dans leur plan et leur fermeture, qui ne reçoivent ni chambranle, ni aucune espèce d’accompagnement, et qui forment le genre le plus simple, en y joignant aussi celles qui sont circulaires en plan et