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belle Villageoise. Le couvent des Servites, bâti tout à coté, fut encore de son architecture, et fut très-vanté. Il n’en reste presque plus rien aujourd’hui, par l’effet des changemens et augmentations qui survinrent dans la suite.

Il s’agissoit alors de faire la grande salle du Conseil dans le palais de la Seigneurie de Florence. Les plus habiles architectes du temps, Michel Ange, Julien de San Gallo, Baccio d’Agnolo, furent admis avec Cronaca, pour en donner les plans, et décider des moyens de sa construction. Savonarole, alors en crédit, favorisa Cronaca, qui fut chargé de l’exécution. Cette salle passe pour être la plus grande de l’Italie. Il fallut y employer, pour sa couverture, des moyens de charpente extraordinaires. Depuis, elle a été restaurée et changée dans sa disposition, comme dans ses ornemens, par Vasari, qui a décrit fort en détail les améliorations qu’il y fit.

Cronaca, dans ses dernières années, s’étoit fort attaché au parti de Savonarole, et il avoit embrassé toutes les opinions de ce fanatique prédicateur. Il n’eut bientôt plus d’autres pensées ni d’autres entretiens : la mort vint l’enlever dans cet état, après une maladie assez longue.

POLLION. Voyez Vitruve.

POLYCLÈTE. Le célèbre statuaire de ce nom, auquel l’antiquité, pour sa Junon colossale d’Argos, en or et ivoire, avoit donné le premier rang après Phidias, fut aussi un très-habile architecte.

Pausanias le cite comme auteur de deux monumens fort remarquables ; l’un à Epidaure, étoit un édifice circulaire qu’on appeloit Tholos, comme nous dirions aujourd’hui la coupole ou le dôme. Il étoit construit en marbre blanc, et dans son intérieur on voyoit des peintures de Pausias. En rapprochant les détails qu’en donne Pausanias, il étoit environné d’un péribole, où s’élevoient autrefois un grand nombre de stèles (cippes ou petites colonnes), sur lesquelles étoient écrits les noms de ceux que le dieu avoit guéris, la maladie que chacun d’eux avoit eue, et la manière dont il avoit été guéri. Au temps de Pausanias, il ne restoit plus que six de ces stèles.

Mais un édifice encore plus renommé de Polyclète, dans la même ville d’Epidaure, étoit le théâtre bâti sur la grande enceinte qui environnoit le temple d’Esculape. Ce théâtre, dit Pausanias, est d’une beauté très-particulière. Les théâtres des Romains (continue-t-il) surpassent véritablement tous les autres pour la magnificence des ornemens, et même pour la grandeur, sans en excepter celui de Mégalopolis, chez les Arcadens. Mais, pour l’harmonie des parties et pour l’élégance, aucun n’approche de celui de Polyclète, qui fut aussi l’architecte de la rotonde dont on vient de parler.

POLYGONE (adj. des deux genres); qui a plusieurs angles et plusieurs côtés. Ce mot est plus particulièrement appliqué à la fortification des places, et est un terme d’architecture militaire.

On l’applique aussi aux figures de dessins à compartimens, et l’on dit polygone régulier ou polygone irrégulier.

Quant à l’architecture, on a, surtout depuis quelques années, employé le mot polygone irrégulier pour définir la taille de pierres employées dans des constructions d’une plus ou moins grande antiquité, à former des murs d’enceinte, de fortifications et autres, à paver les grandes routes, à faire des ponts, etc.

On trouve dans Vitruve l’emploi des pierres polygones irrégulières, sous le nom d’opus incertum. Cet écrivain le décrit comme un genre de maçonnerie, dans lequel de petits moellons de formes irrégulières se rapportoient à joints irréguliers, par le mortier, et formoient les paremens des massifs de maçonnerie bâtis en blocage ou à la rinfusa. Cet appareil de maçonnerie, Vitruve le compare à un autre qu’on appeloit reticulatum, ou à réseau, formé de petits cubes, faisant des compartimens beaucoup plus agréables à la vue, mais moins solides que les paremens de l’opus incertum, qui, dans le fait, n’avoit, contre lui, qu’un aspect de désordre et d’irrégularité.

Il en fut de même de l’opus incertum, ou appareil en grand de blocs de pierres polygones irrégulières. Cette sorte de construction avoit, comme celle qu’on vient de décrire, certains avantages sur l’appareil en pierres de taille régulières (saxum quadratum).

Le premier étoit l’économie de matière, de temps et de travail. Les pierres qu’on employoit ainsi pouvoient servir, quelles que fussent leur forme et leur dimension, rien n’obligeant à une mesure égale dans la disposition qu’on leur donnoit et dans leur liaison à d’autres pierres. Ces pierres, formées ordinairement du délitement des montagnes, avoient leurs paremens tout dressés. Il ne s’agissoit que d’ajuster leurs côtés aux angles déjà donnés par les pierres auxquelles on vouloit les associer ; et comme, dans cette sorte de bâtisse, il n’y avoit ni lits, ni assises, il suffisoit de prendre, avec la règle de plomb, les angles rentrans des pierres déja posées, et d’en porter les lignes ou les traits sur la pierre qu’on devoit leur joindre. Ainsi toute pierre étant bonne, toute forme étant indifférente, ainsi que toute mesure, de semblables appareils ne demandoient aucun art.

Le second avantage de ce genre de construction, surtout dans les murs de fortification des villes, fut que, n’y ayant ni lits ni assises, toute brèche qu’on y pouvoit faire en enlevant quelques pierres, ne devoit pas produire un éboulement considérable ; les pierres s’accrochant les