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NAR NAU


donner aux arches cette grande élévation, et l’architecte y est parvenu, en mettant sous les piles ou pieds-droits de ses arches un grand piédestal couronné d’une cimaise, composée d’un fort talon et d’un filet.

A en juger par la situation de ce pont, par l’irrégularité et par la différence de hauteur dans les deux montagnes, on peut croire que la corniche n’étoit point horizontale, mais qu’elle étoit rampante en suivant l’inclinaison du pavé ; afin d’arriver insensiblement de la montagne la moins élevée à la plus élevée, qui se trouvoit de l’autre côté du fleuve.

La pile a sur la face trente pieds de large, et d’épaisseur vingt-quatre pieds ; l’arche a de haut quatre-vingt-sept pieds, et de large soixante pieds.

Cet édifice est bâti d’une pierre blanche, argileuse, qu’on trouve dans le pays ; elle est fort dure, serrée, compacte et d’un grain fin. Au premier coup d’œil, elle ressemble un peu au marbre ; elle est employée par blocs formant des assises de 54 centim. (1 pied 8 pouces) environ de hauteur. Les blocs paroissent posés à sec, sans aucun ciment, et ils sont liés par des crampons ou agraffes de fer fixées avec du plomb.

Sur l’imposte des arches, dans la largeur du pont, et aux faces intérieures et extérieures du piédestal, on observe plusieurs corbeaux de pierre, dont la queue fait parpaing dans la bâtisse : ils ont la hauteur d’une assise, et environ 33 centim. (1 pouce de saillie). Ils sont placés sans ordre, ce qui peut faire croire qu’ils ne sont point là comme décoration, mais qu’ils ont été faits pour servir a échafauder lors de la construction, et qu’on les a laissé subsister en cas de réparation.

Les assises des piles sont taillées en bossages ; autour de l’arc règne un archivolte, orné d’un gros filet seulement ; l’arc plein-cintre est formé de cinquante-sept voussoires, qui ont de hauteur la largeur de l’archivolte.

La position de ce pont est une des plus agréables ; il traverse une vallée arrosée par la Néra, qui, en donnant la fertilité, offre de toutes parts un riche spectacle. Des peupliers, des mûriers, des figuiers et des arbres à fruits de toute espèce font que ces belles rivières sont encore l’objet de l’étude des architectes, comme celle des peintres de paysages. Narni est à neuf milles de Terni.

Il n’y a plus dans la ville de Narni aucun vestige d’édifices antiques, si ce n’est un fragment d’aqueducs souterrains, qui offre peu d’intérêt.

Pour le pont d’Auguste, consultez l’ouvrage de Antonio Martinelli.

Descrizione di diversi ponti. Roma, 1676, in-4º.

Latium vetus, du P. Volpi.

Leandro Alberti Descrizione dell Italia.

(Huyot.)


NAUMACHIE. Edifice destiné chez les Romains à des espèces de combats, qui étoient une sorte de représentation d’un combat naval.

La forme de la naumachie êtoit celle d’un cirque ou d’un amphithéâtre, à cela près que l’area y étoit creusée plus profondément, pour y recevoir le volume d’eau nécessaire aux vaisseaux qui devoient y voguer.

Les naumachies ne furent point, dans l’origine, des édifices. Il en fut des combats sur l’eau, comme de ceux qui entroient dans tous les jeux du cirque. Avant qu’on eût construit pour ces spectacles de vastes monumens, le creux d’un vallon et des terrains façonnés par l’art pour recevoir les spectateurs, suffirent au but qu’on se proposoit.

De même pour les combats sur l’eau. On commença par creuser des bassins où l’on faisoit entrer l’eau de la rivière, et les spectateurs se rassembloient autour et sur les bords de ces lacs factices.

Entr’autres jeux que César donna au peuple romain, il lui procura le spectacle d’un combat naval, et il fit à cet effet creuser un grand bassin dans le champ de Mars. Auguste fit aussi creuser une naumachie près du Tibre, à l’endroit où, suivant Suétone, se trouva par la suite le parc ou le bois des Césars. L’empereur Claude fit servir à de semblables jeux le lac Fucin. Selon Dion Cassius, il fit entourer en partie le lac d’un amphithéâtre dont les gradins étoient en bois ; le reste de l’espace environnant se composoit de collines sur lesquelles se tenoient les spectateurs. D’autres fois on se servoit probablement de la terre qu’on avoit enlevée pour creuser le bassin, et ces déblaiemens formoient à l’entour l’élévation nécessaire pour y placer des gradins ou des siéges.

Il paroît certain que les cirques mêmes et les amphithéâtres se convertissoient en naumachies, et l’on en a acquis la preuve à l’amphithéâtre de Vespasien, par les fouilles qui depuis quelques années y ont été faites dans le terrain de son area.

Domitien est le premier qui ait construit exprès et en pierres une véritable naumachie. Elle étoit établie près du Tibre. Toutefois cet édifice ne subsista pas long-temps ; et Suétone nous apprend (Vie de Domitien, §. 5) qu’on en employa les Pierres à rebâtir les murs du grand cirque qui tomboient de vétusté. Il faut donc regarder comme à peu près imaginaires les dessins de naumachies qu’on trouve dans certains recueils d’antiquités : il ne reste à Rome aucun vestige de cette sorte d’édifice.

On auroit également de la peine à trouver quelque reste authentique de naumachie dans la plupart des villes antiques dont il subsiste des débris, quoique des traditions apocryphes y fassent souvent mention de ces monumens. Il suffit de quelques vestiges, soit de citernes, soit de bâtimens circulaires, pour faire donner le nom de nauma-