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CABANE, s. f. mot tiré du latin CAPANA.

On entend ordinairement par ce mot une habitation rustique, composée en tout ou en partie de bois on d’argille.

Je pense avoir démontré suffisamment au mot Architecture (Voyez cet article), que si la cabane fut le principe de l’architecture grecque, on ne sauroit en faire le modèle universel de toutes les architectures. Je ne répéterai point ici les raisons tirées autant de la nature des choses que du caractère des différentes architcctures, & qui prouvent invinciblement qu’on ne sauroit appliquer à tous les pays le même genre d’habitations primitives. Le besoin, p&e ; re de toute invention & le premier maître des hommes, varia ses leçons suivant le climat, les productions de chaque pays & le genre de vie de ses habitans. Je ne chercherai pas non plus à prouver la réalité du modèle de l’architecture grecque. Il y a deux choses que l’on est dans l’impossibilité de prouver : ou les choses tellement sauffes qu’elles ne peuvent être soutenues par aucune raison, ou les choses tellement évidentes qu’elles ne peuvent être prouvées par une plus grande évidence ; & c’est dans ce dernier ordre qu’il saut mettre la certitude où nous sommes que l’architecture grecque est une imitation de la cabane rustique & des types de la charpente.

Mais ce modèle, dont l’architecture sut s’appliquer l’esprit & copier les formes par la transposition la plus ingénieuse, ne fut-il lui-même que l’ouvrage déjà perfectionné de la réflexion, & façonné par la comparaison & les règles primitives d’une harmonie naturelle : c’est ce que Vitruve nous apprend.

« Les hommes, dit-il, commencèrent à se faire des huttes avec des seuilles ; d’autres imirant l’industrie des oiseaux, employoient des branches d’arbre & de la terre grasse à se pratiquer des abris où ils pussent de mettre à convert. Chacun considérant I’ouvrage de son voisin, & perfectionnant ses propres inventions par les remarques qu’il faisoit sur celles d’autrui, li se faisoit de jour en jour un grand progrès dans la bonne manièe de bâtir les cabanes. Car les hommes, dont le naturel est docile & porté à l’imitation, se glorifiant de leurs inventions, se communiquoient tous les jours ce qu’ils avoient trouvé pour bien réssir dans l’art de bâtir. Ainsi, exerçant leur esprit, ils formoient leur jugement dans la recherche de tout ce qui peut contribuer à ce dessein ».

Vitruve, en nous indiquant les premiers pas de l’homme dans l’invention de l’architecture, nous


donne à connoître qu’ils n’arrivèrent pas du premier coup à la persection dont la cabane étoit susceptible ; d’où il résulte que ce qu’on regarde comme l’ébauche & le premier essai de l’art, avoit été précédé d’ébauches & d’essais plus informes les uns que les autres. En effet, si l’on considère la nature de la cabane, dont l’architecture grecque nous a laissé, dans ses plus parsaits monumens, l’imitation la moins équivoque, on y reconnoît une intelligence de disposition, un accord de proportions qui ne put être que le résultat de connoissancs déjà sort avancées ; à moins qu’on ne veuille que l’imitation ait rectifié son modèle au point que les traces originaires de l’invention aient entiérement disparu.

J’ai dit au mot architecture ce qu’on pouvoit penser de la réalité de ce modèle & de la nécessité de l’imiter, quand bien même il ne seroit qu’imaginaire. Jai fait voir que, réelle ou sictive, la cabane étoit devenue le type invariable de l’architecture, & comme la formule dans laquelle devoient se renfermer tous les principes de l’art ; qu’il fallout adopter un autre type d’architecture, ou suivre réguliérement ce que celui de la charpente nous prescript. J’ai voir aussi que des autres modèles que l’architecture a survis dans les différens pays, celui de la cabane de bois avoit été, comme il devoit être en effet, le plus simple, le plus varié, le plus sécond, le plus susceptible de combinaisons heureuses ; celui enfin dont l’imitation offroit à l’art le plus de resources & les plus ingénieuses.

Mais il paroît que la nature qui servit si bien les Grecs dans le genre de modéle qu’elle présenta à l’art, leur avoit encore suggéré la forme de cabane la plus favorable aux développemens de l’imitation.

C’est ce dont on se persuade, quand on réfléchit à toutes les formes variées que l’industrie des sociétés naissantes put imprimer aux premières habitations du besoin. Virtuve nous a conservé les détails de ces essays chez plusieurs peuples.

« Au royaume de Pont, dans la Colchide, où il se trouve quantité de bois, on bâtit les cabanes en cette manière. après avoir couché des arbres tout de leur long sur terre à droite & à gauche, laissant autant d’espace entre-deux que les arbres sont longs, ils posent sur leurs extrémités d’autres arbres en travers, de manière qu’ils enferment tout l’espace destiné pour l’habitation. Ensuite ils posent des quatre côtés d’autres arbres ui portent les uns sur les autres au droit des coins ; & ainsi les mettant à plomb de ceux d’en bas, ils élèvent les murailles. Les intervalles d’entre les arbres qui répondent à leur épaisseur, se