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formes doit en faire tous les frais, & sur-tout dans ce genre-ci. Sa forme doit indiquer son nom.

De toutes les Agraffes, celles qui sont en console sont les plus propres à remplir cette condition qui est de bien embrasser toutes les parties qu’elles doivent paroître Agraffez ; c’est peut-être aussi de cette forme que cet ornement d’Architecture aura tiré son nom ; ainsi, sous ce point de vue, l’Agraffe rentre dans la classe des clefs, (voyez ce mot.) ou des consoles. Voy. CONSOLE. Les exemples modernes qu’on pourroit citer de cetre espèce d’ornemens à Paris, sont tous si bizarres, si ridicules & si défectueux, que nous-nous dispenserons de faire sortir tous ces produits fantastiques de l’oubli auquel les a condamnés l’esprit de modes qui les avoit enfantés. Nous ne citerons pas même les modèles de Blondel en ce genre. Mais les quatre observations qu’il fait relativement à ces compositions, peuvent être utiles : il recommande 1º de ne point faire les Agraffes inclinées ; 2º d’éviter de les faire trop matérielles ; 3º de leur donner une saillie convenable qui ne péche ni par excès ni par défaut, deux inconvéniens soumis à l’examen & au jugement du goût ; 4º de les faire simples ou riches en raison de la magnificence des façades où elles sont employées.

C’est dans les consoles antiques qu’il faut puiser le bon goût qu’exige ce genre de décoration, La console ou clef de l’arc de Titus, celle qu’on voit au Capitole dans la Cour des conservateurs ; celle de l’arc de Pola, sont des chefs-d’œuvre de forme, de richesse, de bon goût & d’exécution qu’on ne sçauroit trop consulter. Les Anciens sculptoient souvent des figures entières, ou des masques sur ces clefs. Voyez CLEF.

AGRAFFE. (terme de Jardinage.) C’est un ornement qui sert à lier deux figures dans un parterre, un nœud qu’on colle à la plate-bande, pour n’en faire paroître que la moitié qui se lie, & former un tout avec le reste de la broderie.

AGRANDIR, v. act. donner plus d’étendue à un Palais, à un Jardin.

AGRIGENTE, appellée aujourd’hui Girgenti, fut une des plus célébres villes de l’antiquité pour l’Architecture. On disoit de ses habitans qu’ils se livroient au plaisir comme n’ayant qu’un jour à vivre, & qu’ils bâtisloient comme ne devant jamais mourir. Agrigentini ita deliciis indulgent ac si postridiè morituri, domos vero aedificant quasi perpetuò victuri. Cette ville antique est de celles, dont les restes nous sont parvenus, une des plus considérables, & des plus importantes par ses ruines & les débris précieux de ses monumens, dont quelques-uns sont encore presqu’entiers ; nous allons en faire le détail.

Le plus considérable de ses temples, & un des premiers de la Grece pour la grandeur, étoit celui de Jupiter qu’on apelle aujourd’hui temple des Géants ; Il doit cette dénomination populaire soit aux blocs


gigantesques qui formoient sa construction, soit au bas-reliefd’un de ses frontons qui représentoit la chute des Géants. Ce n’est plus aujourd’hui qu’un amas confus de pierres énormes, & dont la majeure partie a été employée à la construction du nouveau mole Girgenti. Ce temple, selon Diodore de Sicile, avoit 340 pieds de long, 60 de large, & 120 de haut jusqu’à la naissance de la voûte. M. de Saint-Non observe qu’il y aura eu une erreur de copiste à l’égard des 60 pieds de large, & qu’on aura oublié le nombre cent auparavant : cette correction est plus que probable d’après la connoissance des autres temples Grecs & le parallèle de leurs proportions : ce temple auroit eu en longueur près de cinq fois sa largeur, ce qui est entièrement contraire aux usages de l’antiquité, & aux mesures connues de tous les temples. Ses colonnes, continue Diodore, avoient 20 pieds de circonférence ; &, comme elles étoient cannelées, un homme, dit-il, pouvoit se cacher dans une de ses cannelures.

Un seul chapiteau échappé à la destruction totale nous a permis de faire cette vérification ; & nous avons trouvé le récit de l’historien antique conforme à la vérité : nous avons reconnu qu’une de ces cannelures avoit, prise auprès du chapiteau, 19 pouces 3 lignes de large. M. de Saint-Non n’y compte que 18 pouces, petite différence qui peut résulter de la variété des cannelures.

Le temple d’Hercule ne le cédoit pas beaucoup en grandeur à celui de Jupiter : il n’en subsiste en pied que quelques assises de deux colonnes, une partie de mur intérieur, & quelques fragmens de soubassement. Le tout ne présente aujourd’hui qu’une montagne de blocs de pierres culbutées & amoncelées d’une manière effrayante.

Le temple de Junon-Lucine ou Lacinie, situé à l’angle oriental de la partie méridionale de la ville, devoit être un des plus beaux d’Agrigente, quoiqu’il ne fût pas des plus grands : il a 118 pieds de long sur 51 de large ; au commencement de ce siècle, il existoit presqu’en entier ; mais diverses secousses de tremblemens de terre, & les ouragans qui sont violens dans ce pays ont successivement abatu plus de la moitié de ses colonnes. En 1779, il restoit encore, sur pied, une quinzaine de colonnes. Ce temple se restaureroit aisément parce qu’on n’a point enlevé ses matériaux, & qu’on trouveroit facilement à remettre en leurs places les mêmes pierres. Il est élevé sur un grand Stylobate ou socle de dix pieds de hauteur qui sert de base à tout l’édifice, & présente une plate-forme au couchant & à l’orient du temple ; c’est de ce dernier côté qu’étoit l’entrée : on montoit à cette plate-forme par deux escaliers latéraux de six marches qui coupoient par moitié trois gradins formant l’élévation totale du Stylobate. Sur ce soubassement sont les quatre gradins sur lesquels posent les colonnes d’ordre Dorique sans base & cannelées formant un carré long, de treize colonnes de profondeur, sur six de face. On trouve dans le Stylobate