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promesses fallacieuses, que ces programmes de tout genre au moyen desquels d’avide.s spéculateurs en imposent aux crédules ! Lisez les annonces emphatiques de ces médecins, voyez ces sac hets et ces panacées dont certains pharmaciens font dépendre votre vie. L’abus est dans tout cela : il est aussi dans ces prospectus à grandes promesses dont pas une ne sera réalisée ; dans ces éditions nouvelles (voy. Éditions) destinées seulement à faire revivre la première ; dans ces éloges de la presse dont se parent auteurs ou éditeurs après se les être décernés eux-mêmes (voy. Charlatanisme). Au théâtre, le goût du jour, curieux de nudités ou de bourreaux, pourrait bien être un abus ; mais ce qui en est certainement un, c’est l’office de ces aristarques grossiers et mercenaires, de ces chevaliers du lustre qui font le succès des pièces nouvelles (voy. Claqueurs et Cabale). Dans les écoles, que d’abus encore ! et nous en enflerions singulièrement la liste si nous nous introduisions dans les lieux retentissant de toutes ces théories nouvelles ou réchauffées, auxquelles, si les oracles des nouveaux prophètes méritent créance, les générations futures devront leur salut. A les en croire, ces prophètes et leurs apôtres, tout dans nos vieilles sociétés est abus, criant abus, et surtout la propriété avec sa transmission héréditaire en première ligne. Mais eux-mêmes n’abusent-ils point de la facilité du public, et les tribunaux n’ont-ils pas déjà retenti d’inculpations dont toutes n’ont pu être repoussées ? L’arbitraire d’un père suprême est-il plus rationnel que toute autre infaillibilité humaine, et est-ce le tout, pour être réformateur, que de substituer une langue à une autre, et de combattre par des lieux communs quelques traditions surannées ? (Voy. Saint-Simoniens, Église catholique française, Templiers, etc.)

Certes, tout n’est pas faux dans ces théories nouvelles ; mais tout n’y est pas non plus d’une origine pure et d’une utilité reconnue. Il y a là, en bien des points, abus du crédit, abus de l’intelligence, abus des choses saintes, et de ce mouvement général des esprits qui se porte au nouveau et cherche à satisfaire


des besoins auxquels jusque là nos sociétés n’avaient rien à offrir. L’abus des mots, non moins commun que l’abus des choses et peut-être le fruit de celui-ci, n’est pas moins dangereux : il confond les idées, fausse l’intelligence, vicie le jugement, et devient la source de tant d’ennuyeuses déclamations, de stériles théories, et de cette redondance de discours où règne le vague et qui exclut la propriété de l’expression, la précision, et souvent même le bon sens. J.H.S.

ABUS (appel comme d'. Il y a abus dans le sens du droit public toutes les fois qu’ un supérieur ou une autre personne ecclésiastique commet quelque usurpation ou excès de pouvoir, quelque contravention aux lois et aux réglemens du royaume, ou bien une infraction aux règles consacrées par les canons reçus en France, un attentat aux libertés, franchises et coutumes de l’église gallicane ; enfin, comme porte la loi du 18 germinal an x, art.6 : « Il y a abus dans toute « entreprise ou tout procédé qui dans « l’exercice du culte peut compromettre « l’honneur des citoyens, troubler arbi « trairement leur conscience, dégénérer « contre eux en oppression, en injure « ou en scandale public. »

L’on conçoit facilement, dès-lors, comment le mot abus est appliqué à l’un de ces cas. Il est évident que la juridiction ecclésiastique et la juridiction séculière ayant chacune un but distinct et séparé, les confondre c’est commettre un abus ; aussi la même loi citée plus haut, et qui détermine que c’est au conseil d’état qu’il faut avoir recours dans tous les cas où l’abus est commis par des ecclésiastiques, ajoute (art. 7) que le recours peut avoir lieu également « lorsqu’il est « porté atteinte à l’exercice public du « culte et à la liberté que les lois et ré- « glemens garantissent à ses ministres. »

Il faut remonter à la reconnaissance du christianisme par Constantin pour trouver l’origine du recours à l’autorité des princes souverains lorsque des juges ecclésiastiques abusaient de leur pouvoir soit en connaissant des causes qui n’étaient pas de leur compétence, soit en violant les canons ; et c’est saint Atha-