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LES ROUGON-MACQUART.

nuait de sourire, elle ne semblait pas savoir qu’elle toussait, répétant :

— Je vais me lever demain, j’apprendrai mon catéchisme sans une faute, nous serons tous très-contents.

Hélène, au pied du lit, eut un sanglot. Elle qui ne pouvait pleurer, sentait un flot de larmes monter à sa gorge, en écoutant le rire de Jeanne. Elle suffoquait, elle se sauva dans la salle à manger, pour cacher son désespoir. L’abbé l’avait suivie. M. Rambaud s’était levé vivement, afin d’occuper la petite.

— Tiens ! maman a crié, est-ce qu’elle s’est fait du mal ? demandait-elle.

— Ta maman ? répondit-il. Mais elle n’a pas crié, elle a ri, au contraire, parce que tu te portes bien.

Dans la salle à manger, Hélène, la tête tombée sur la table, étouffait ses sanglots entre ses mains jointes. L’abbé se penchait, la suppliait de se contenir. Mais, levant sa face ruisselante, elle s’accusait, elle lui disait qu’elle avait tué sa fille ; et toute une confession s’échappait de ses lèvres, en paroles entrecoupées. Jamais elle n’aurait cédé à cet homme, si Jeanne était restée auprès d’elle. Il avait fallu qu’elle le rencontrât dans cette chambre inconnue. Mon Dieu ! le ciel aurait dû la prendre avec son enfant. Elle ne pouvait plus vivre. Le prêtre, effrayé, la calmait en lui promettant le pardon.

On sonna, un bruit de voix vint de l’antichambre. Hélène essuyait ses yeux, lorsque Rosalie entra.

— Madame, c’est le docteur Deberle…

— Je ne veux pas qu’il entre.

— Il demande des nouvelles de mademoiselle.

— Dites-lui qu’elle va mourir.

La porte était restée ouverte, Henri avait entendu.