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LES ROUGON-MACQUART.


Elle voulait se retourner. Hélène retira ses gants, la saisit le plus doucement possible et la recoucha. Comme elle était encore penchée, la porte s’ouvrit, et elle fut si surprise de voir entrer le docteur Deberle, qu’une rougeur monta à ses joues. Lui aussi avait donc des visites dont il ne parlait pas ?

— C’est monsieur le médecin, bégayait la vieille. Vous êtes tous bien bons, que le ciel vous bénisse tous !

Le docteur avait salué discrètement Hélène. La mère Fétu, depuis qu’il était entré, ne geignait plus si fort. Elle gardait seulement une petite plainte sifflante et continue d’enfant qui souffre. Elle avait bien vu que la bonne dame et le docteur se connaissaient, et elle ne les quittait plus du regard, allant de l’un à l’autre, avec un sourd travail dans les mille rides de son visage. Le docteur lui posa quelques questions, percuta le côté droit. Puis, se tournant vers Hélène qui venait de se rasseoir, il murmura :

— Ce sont des coliques hépatiques. Elle sera sur pied dans quelques jours.

Et, déchirant une page de son carnet sur laquelle il avait écrit quelques lignes, il dit à la mère Fétu :

— Tenez, vous ferez porter cela chez le pharmacien de la rue de Passy, et vous prendrez toutes les deux heures une cuillerée de la potion qu’on vous donnera.

Alors, de nouveau, elle éclata en bénédictions. Hélène restait assise. Le docteur parut s’attarder, la regardant, lorsque leurs yeux se rencontraient. Puis, il salua et se retira le premier, par discrétion. Il n’avait pas descendu un étage, que la mère Fétu reprenait ses gémissements.

— Ah ! quel brave médecin !… Pourvu que son remède me fasse quelque chose ! J’aurais dû écraser de