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UNE PAGE D’AMOUR.

Et, prenant le parapluie pour le porter à la cuisine, sur la pierre de l’évier :

— Hein ? quelle pluie !… Zéphyrin, qui vient d’arriver, était trempé comme une soupe… Je me suis permis de le retenir à dîner, madame. Il a la permission de dix heures.

Hélène, machinalement, la suivait. Elle semblait avoir le besoin de revoir toutes les pièces de son appartement, avant d’ôter son chapeau.

— Vous avez bien fait, ma fille, répondit-elle.

Un instant, elle se tint sur le seuil de la cuisine, regardant les fourneaux allumés. D’un geste instinctif, elle ouvrit une armoire et la referma. Tous les meubles étaient à leur place ; elle les retrouvait, cela lui causait un plaisir. Cependant, Zéphyrin s’était levé respectueusement. Elle sourit, en lui adressant un léger signe de tête.

— Je ne savais plus si je devais mettre le rôti, reprit la bonne.

— Quelle heure est-il donc ? demanda-t-elle.

— Mais bientôt sept heures, madame.

— Comment ! sept heures !

Et elle resta très-étonnée. Elle avait perdu la conscience du temps. Ce fut pour elle un réveil.

— Et Jeanne ? dit-elle.

— Oh ! elle a été bien sage, Madame. Même je crois qu’elle s’est endormie, car je ne l’ai plus entendue.

— Vous ne lui avez donc pas donné de la lumière ?

Rosalie resta embarrassée, ne voulant pas raconter que Zéphyrin lui avait apporté des images. Mademoiselle n’avait pas bougé, c’était que mademoiselle n’avait besoin de rien. Mais Hélène ne l’écoutait plus. Elle entra dans la chambre, où un grand froid la saisit.