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LES ROUGON-MACQUART.

sans force, elle n’éprouvait plus aucun trouble à la sentir si près d’elle. Un moment, leurs poignets nus s’effleurèrent, et elles se sourirent. Elles étouffaient, Hélène voulut que Juliette passât la première, pour la protéger. Toute leur intimité semblait revenue.

— C’est entendu, n’est-ce pas ? demanda madame Deberle, nous comptons sur vous demain soir.

Hélène n’eut plus la volonté de dire non. Dans la rue, elle verrait. Enfin, elles sortirent les dernières. Pauline et Jeanne les attendaient sur le trottoir d’en face. Mais une voix larmoyante les arrêta.

— Ah ! ma bonne dame, qu’il y a donc longtemps que je n’ai eu le bonheur de vous voir !

C’était la mère Fétu. Elle mendiait à la porte de l’église. Barrant le passage à Hélène, comme si elle l’avait guettée, elle continua :

— Ah ! j’ai été bien malade, toujours là, dans le ventre, vous savez… Maintenant c’est quasiment des coups de marteau… Et rien de rien, ma bonne dame… Je n’ai pas osé vous faire dire ça… Que le bon Dieu vous le rende !

Hélène venait de lui glisser une pièce de monnaie dans la main, en lui promettant de songer à elle.

— Tiens ! dit madame Deberle restée debout sous le porche, quelqu’un cause avec Pauline et Jeanne… Mais c’est Henri !

— Oui, oui, reprit la mère Fétu qui promenait ses minces regards sur les deux dames, c’est le bon docteur… Je l’ai vu pendant toute la cérémonie, il n’a pas quitté le trottoir, il vous attendait, bien sûr… En voilà un saint homme ! Je dis ça parce que c’est la vérité, devant Dieu qui nous entend… Oh ! je vous connais, madame ; vous avez là un mari qui mérite d’être heureux… Que le Ciel exauce vos désirs, que