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UNE PAGE D’AMOUR.

qu’une vive lumière et des chants éclataient. La cérémonie était commencée. Hélène, voyant la nef centrale déjà pleine, voulut suivre l’un des bas-côtés. Mais elle eut toutes les peines du monde à s’approcher de l’autel. Elle tenait la main de Jeanne, elle avançait patiemment ; puis, renonçant à aller plus loin, elle prit les deux premières chaises libres qui se présentèrent. Un pilier leur cachait la moitié du chœur.

— Je ne vois rien, maman, murmura la petite, toute chagrine. Nous sommes très-mal.

Hélène la fit taire. L’enfant alors se mit à bouder. Elle n’apercevait, devant elle, que le dos énorme d’une vieille dame. Quand sa mère se retourna, elle la trouva debout sur sa chaise.

— Veux-tu descendre ! dit-elle en étouffant sa voix. Tu es insupportable.

Mais Jeanne s’entêtait.

— Écoute donc, c’est madame Deberle… Elle est là-bas, au milieu. Elle nous fait des signes.

Une vive contrariété donna à la jeune femme un mouvement d’impatience. Elle secoua la petite, qui refusait de s’asseoir. Depuis le bal, pendant trois jours, elle avait évité de retourner chez le docteur, en prétextant mille occupations.

— Maman, continuait Jeanne avec l’obstination des enfants, elle te regarde, elle te dit bonjour.

Alors, il fallut bien qu’Hélène tournât les yeux et saluât. Les deux femmes échangèrent un hochement de tête. Madame Deberle, en robe de soie à mille raies, garnie de dentelles blanches, occupait le centre de la nef, à deux pas du chœur, très-fraîche, très-voyante. Elle avait amené sa sœur Pauline, qui se mit à gesticuler vivement de la main. Les chants continuaient,