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SON EXCELLENCE EUGÈNE ROUGON.

la fin ! On m’attend, je n’ai pas de temps à perdre… Je vous donne un quart d’heure, entendez-vous !

Le brigadier disparut de nouveau, emmenant ses hommes, les lançant dans des directions différentes. Trois quarts d’heure se passèrent, puis quatre, puis cinq. Au bout d’une heure et demie, un gendarme se montra enfin, la mine longue : toutes les recherches étaient restées sans résultat. Gilquin, pris de fièvre, marchait d’un pas saccadé, allant de la porte à la fenêtre, regardant tomber le jour. Sûrement on ouvrirait le bal sans lui ; la femme du proviseur croirait à une impolitesse ; cela le rendrait ridicule, paralyserait ses moyens de séduction. Et, chaque fois qu’il passait devant le notaire, il sentait la colère l’étrangler ; jamais malfaiteur ne lui avait donné tant d’embarras. Le notaire, plus froid, plus blême, restait allongé, sans un mouvement.

Ce fut seulement à sept heures passées que le brigadier reparut, l’air rayonnant. Il avait enfin trouvé le vieux coupé de l’aubergiste, caché au fond d’un hangar, à un quart de lieue du village. Le coupé était tout attelé, et c’était l’ébrouement du cheval qui l’avait fait découvrir. Mais quand la voiture fut à la porte, il fallut habiller M. Martineau. Cela prit un temps fort long. Madame Martineau, avec une lenteur grave, lui mit des bas blancs, une chemise blanche ; puis, elle le vêtit tout en noir, pantalon, gilet, redingote. Jamais elle ne consentit à se laisser aider par un gendarme. Le notaire s’abandonnait entre ses bras sans une résistance. On avait allumé une lampe. Gilquin tapait dans ses mains d’impatience, tandis que le brigadier, immobile, mettait au plafond l’ombre énorme de son chapeau.

— Est-ce fini, est-ce fini ? répétait Gilquin.

Madame Martineau fouillait un meuble depuis cinq