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SON EXCELLENCE EUGÈNE ROUGON.

queue du cortége, des escadrons de cent-gardes, de cuirassiers et de carabiniers, s’enfonçaient dans la rue d’Arcole. Puis, il se produisit un tumulte épouvantable ; la double haie des gardes nationaux et des soldats de la ligne fut rompue en plusieurs endroits ; des femmes criaient.

— Allons-nous-en, répéta Gilquin. On va s’écraser.

Et, quand il eut posé ces dames sur le trottoir, il leur fit traverser la chaussée, malgré la foule. Madame Correur et les Charbonnel étaient d’avis de suivre le parapet, pour prendre le pont Notre-Dame et aller voir ce qui se passait sur la place du Parvis. Mais il ne les écoutait pas, il les entraînait. Lorsqu’ils furent de nouveau devant le petit café, il les poussa brusquement, les assit à la table qu’ils venaient de quitter.

— Vous êtes encore de jolis cocos ! leur criait-il. Est-ce que vous croyez que j’ai envie de me faire casser les pattes par ce tas de badauds ?… Nous allons boire quelque chose, parbleu ! Nous sommes mieux-là qu’au milieu de la foule. Hein ! nous en avons assez, de la fête ! Ça finit par être bête… Voyons, qu’est-ce que vous prenez, maman ?

Les Charbonnel, qu’il couvait de ses yeux inquiétants, élevèrent de timides objections. Ils auraient bien voulu voir la sortie de l’église. Alors, il leur expliqua qu’il fallait laisser les curieux s’écouler ; dans un quart d’heure, il les conduirait, s’il n’y avait pas trop de monde pourtant. Madame Correur, pendant qu’il redemandait à Jules des cigares et de la bière, s’échappa prudemment.

— Eh bien, c’est ça, reposez-vous, dit-elle aux Charbonnel. Vous me trouverez là-bas.

Elle prit le pont Notre-Dame et s’engagea dans la rue de la Cité. Mais l’écrasement y était tel, qu’elle mit un grand quart d’heure pour atteindre la rue de Cons-