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lumière. Déjà, elle avait franchi la grille du parc, puis s’était lancée au travers des hautes herbes du Clos-Marie. Tout en courant, elle pensait que jamais elle ne pourrait patienter jusqu’au lever du soleil, que le mieux était de frapper chez les Hubert, pour les éveiller et leur tout dire. C’était une expansion de bonheur, une révolte de franchise : elle se sentait incapable de le taire cinq minutes encore, ce secret gardé si longtemps. Elle entra dans le jardin, referma la porte.

Et là, contre la cathédrale, Angélique aperçut Hubertine, qui l’attendait dans la nuit, assise sur le banc de pierre, qu’une maigre touffe de lilas entourait. Réveillée, avertie par une angoisse, celle-ci était montée, avait compris en trouvant les portes ouvertes. Et, anxieuse, ne sachant où aller, craignant d’aggraver les choses, elle attendait.

Tout de suite, Angélique se jeta à son cou, sans confusion, le cœur bondissant d’allégresse, riant gaiement de n’avoir plus rien à cacher.

— Ah ! mère, c’est fait !… Nous allons nous marier, je suis si contente !

Avant de répondre, Hubertine l’examinait fixement. Mais ses craintes tombèrent, devant cette virginité en fleur, ces yeux limpides, ces lèvres pures. Et il ne lui resta que beaucoup de chagrin, des larmes coulèrent sur ses joues.

— Ma pauvre enfant ! murmura-t-elle, comme la veille, dans l’église.