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ses lèvres avides de caresses, elle la baisa passionnément.

Les Hubert en eurent l’âme retournée, bégayant, près de pleurer eux-mêmes.

— Chère, chère enfant !

Elle n’était donc pas encore tout à fait mauvaise ? Peut-être pourrait-on la corriger de cette violence qui les avait effrayés.

— Oh ! je vous en prie, ne me reconduisez pas chez les autres, balbutia-t-elle, ne me reconduisez pas chez les autres !

Le mari et la femme s’étaient regardés. Justement, depuis l’automne, ils faisaient le projet de prendre une apprentie à demeure, quelque fillette qui égaierait la maison, si attristée de leurs regrets d’époux stériles. Et ce fut décidé tout de suite.

— Veux-tu ? demanda Hubert.

Hubertine répondit sans hâte, de sa voix calme :

— Je veux bien.

Immédiatement, ils s’occupèrent des formalités. Le brodeur alla conter l’aventure au juge de paix du canton nord de Beaumont, M. Grandsire, un cousin de sa femme, le seul parent qu’elle eût revu ; et celui-ci se chargea de tout, écrivit à l’Assistance publique, où Angélique fut aisément reconnue, grâce au numéro matricule, obtint qu’elle resterait comme apprentie chez les Hubert, qui avaient un grand renom d’honnêteté. Le sous-inspecteur de l’arrondissement, en venant régula-