n’existât plus, pas même sa pensée, pourvu que rien de lui désormais ne troublât l’existence de sa chère femme !
Pascal se mit donc à écrire une de ses réponses habituelles, qu’il faisait volontairement, à grand’peine, insignifiante et presque froide. Clotilde, dans sa dernière lettre, sans se plaindre de Maxime, laissait entendre que son frère se désintéressait d’elle, amusé davantage par Rose, la nièce du coiffeur de Saccard, cette petite jeune fille très blonde, à l’air candide. Et il flairait quelque manœuvre du père, une savante captation autour du fauteuil de l’infirme, que ses vices, si précoces jadis, reprenaient, aux approches de la mort. Mais, malgré son inquiétude, il n’en donnait pas moins de très bons conseils à Clotilde, en lui répétant que son devoir était de se dévouer jusqu’au bout. Quand il signa, des larmes lui obscurcissaient la vue. C’était sa mort de bête vieillie et solitaire, sa mort sans un baiser, sans une main amie, qu’il signait. Puis, des doutes lui vinrent : avait-il raison de la laisser là-bas, dans ce milieu mauvais, où il sentait toutes sortes d’abominations autour d’elle ?
À la Souleiade, chaque matin, le facteur apportait les lettres et les journaux, vers neuf heures ; et Pascal, quand il écrivait à Clotilde, avait l’habitude de guetter, pour lui remettre la lettre, de façon à être bien certain qu’on n’interceptait pas sa correspondance. Or, ce matin-là, comme il était descendu lui donner celle qu’il venait d’écrire, il fut surpris d’en recevoir une nouvelle de la jeune femme, dont ce n’était pas le jour. Pourtant, il laissa partir la sienne. Ensuite, il remonta, il reprit sa place devant sa table, déchirant l’enveloppe.
Et, dès les premières lignes, ce fut un grand saisissement, une stupeur. Clotilde lui écrivait qu’elle était enceinte de deux mois. Si elle avait tant hésité à lui annoncer cette nouvelle, c’était qu’elle voulait avoir elle-