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seul et ardent désir de charité, celui de les mettre devant elle aux bras l’un de l’autre, pour être sûre que la querelle était finie.

— Que je l’embrasse, ah ! non, par exemple ! dit Louise. Il m’a dit trop de sottises.

— Jamais ! cria Lazare.

Alors, elle éclata franchement de rire.

— Allons, ne boudez pas. Vous savez que je suis une grosse entêtée… Mon dîner brûle, notre monde nous attend… Je vais te pousser, Lazare, si tu refuses d’obéir. Mets-toi à genoux devant elle, prends-la gentiment sur ton cœur… Allons, allons, mieux que ça !

Et elle les jeta dans une étreinte d’amoureux, elle les regarda se baiser au visage, d’un air de joyeux triomphe, sans qu’un trouble passât au fond de ses yeux clairs. C’était, en elle, une chaleur de joie, comme une flamme subtile, qui la soulevait au-dessus d’eux. Cependant, son cousin serrait sa femme avec un remords éperdu ; pendant que celle-ci, encore en camisole, les bras et le cou nus, lui rendait ses caresses en pleurant plus fort.

— Vous voyez bien, ça vaut mieux que de se battre, dit Pauline. Je me sauve, vous n’avez plus besoin de moi pour faire la paix.

Déjà, elle était à la porte, et elle la referma vivement sur cette chambre d’amour, au lit ouvert, aux vêtements épars, dont l’odeur d’héliotrope à cette heure l’attendrissait, comme une odeur complice qui allait achever sa tâche de réconciliation.

En bas, dans la cuisine, Pauline se mit à chanter, en tournant encore une fois son ragoût. Elle alluma un fagot, monta le tournebroche pour le canard, surveilla le rôti d’un œil expérimenté. Cette beso-