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Madame Bouland, d’une main rapide, coupa et lia le cordon, après avoir laissé échapper une légère quantité de sang. Il ne respirait toujours pas, les battements du cœur restaient insensibles.

— C’est fini, déclara Cazenove. Peut-être pourrait-on essayer des frictions et des insufflations ; mais je crois qu’on perdrait son temps… Et puis, la mère est là qui a grand besoin que je songe à elle.

Pauline écoutait.

— Donnez-le-moi, dit-elle. Je vais voir… S’il ne respire pas, c’est que je n’aurais plus de souffle.

Et elle l’emporta dans la pièce voisine, après avoir pris la bouteille d’eau-de-vie et des linges.

De nouvelles tranchées, beaucoup plus faibles, sortaient Louise de son accablement. C’étaient les dernières douleurs de la délivrance. Quand le docteur eut aidé à l’expulsion du délivre, en tirant sur le cordon, la sage-femme la souleva pour ôter les serviettes, qu’un flot épais de sang venait de rougir. Ensuite, tous deux l’allongèrent, les cuisses lavées et séparées l’une de l’autre par une nappe, le ventre bandé d’une large toile. La crainte d’une hémorragie tourmentait encore le docteur, bien qu’il se fût assuré qu’il ne restait pas de sang à l’intérieur, et que la quantité perdue était à peu près normale. D’autre part, le délivre lui paraissait complet ; mais la faiblesse de l’accouchée, et surtout la sueur froide dont elle était couverte, demeuraient très alarmantes. Elle ne bougeait plus, d’une pâleur de cire, le drap au menton, écrasée sous les couvertures qui ne la réchauffaient point.

— Restez, dit à la sage-femme le médecin, qui ne lâchait pas le pouls de Louise. Moi-même, je ne la quitterai que lorsque je serai rassuré tout à fait.