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pareilles. Mais Lazare retournait l’ordonnance entre ses doigts fébriles. Le mot digitale flamboyait : sa mère était perdue.

— Je remonte, finit-il par dire.

À la porte, il hésita, il demanda à sa cousine :

— Viendras-tu un instant ?

Elle aussi eut une légère hésitation.

— J’ai peur de la contrarier, murmura-t-elle.

Un silence embarrassé régna, et il monta seul, sans ajouter un mot.

Au déjeuner, pour ne pas inquiéter son père, Lazare reparut, très pâle. De temps à autre, un coup de sonnette appelait Véronique, qui se promenait avec des assiettées de potage, auxquelles la malade touchait à peine ; et, quand elle redescendait, elle racontait à Pauline que le pauvre jeune homme perdait la tête, en haut. C’était une pitié, de le voir grelotter la fièvre devant sa mère, les mains malhabiles, la figure bouleversée, comme s’il avait craint, à chaque minute, de la sentir passer entre ses bras. Vers trois heures, la bonne venait encore de monter, lorsqu’elle appela la jeune fille, en se penchant sur la rampe. Puis, quand celle-ci fut sur le palier du premier étage :

— Vous devriez entrer, mademoiselle, pour lui donner un coup de main. Tant pis si ça la fâche ! Elle veut qu’il la retourne, et si vous le voyiez frémir, sans oser la toucher seulement !… Avec ça, elle me défend d’approcher.

Pauline entra. Carrément assise contre trois oreillers, madame Chanteau aurait paru garder le lit par simple paresse, sans le souffle court et pénible qui soulevait ses épaules. Devant elle, Lazare balbutiait :