Page:Emile Zola - La Joie de vivre.djvu/163

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ment, au fond de la chambre. Un silence pénible se faisait, lorsqu’une voix légère s’éleva du lit.

— Lazare, prends la clef sous mon oreiller, donne à ma tante ce qu’elle voudra.

Tous deux restèrent saisis. Lui, protestait, ne voulait pas fouiller dans la commode. Mais il dut céder, pour ne point tourmenter Pauline. Lorsqu’il eut remis un billet de cent francs à sa mère, et qu’il revint glisser la clef sous l’oreiller, il trouva la malade en proie à un nouveau frisson, qui la secouait comme un jeune arbre, près de se rompre. Et deux grosses larmes coulaient sur ses joues, de ses pauvres yeux fermés.

Le docteur Cazenove ne parut qu’à son heure habituelle. Il n’avait pas même vu le petit Cuche, qui polissonnait sans doute dans les fossés. Dès qu’il eut écouté Lazare et jeté un coup d’œil sur Pauline, il cria :

— Elle est sauvée !

Ces nausées, ces frissons terribles étaient simplement les indices que l’abcès perçait enfin. On n’avait plus à craindre la suffocation, désormais le mal allait se résoudre de lui-même. La joie fut grande, Lazare accompagna le docteur, et comme Martin, l’ancien matelot resté au service de ce dernier, avec sa jambe de bois, buvait un verre de vin dans la cuisine, tout le monde voulut trinquer. Madame Chanteau et Louise prirent du brou de noix.

— Je n’ai jamais été sérieusement inquiète, disait la première. Je sentais que ça ne serait rien.

— N’empêche que la chère enfant en a vu de grises ! répliquait Véronique. Vrai ! on me donnerait cent sous que je ne serais pas si contente.

À ce moment, l’abbé Horteur entra. Il venait cher-