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LES ROUGON-MACQUART.

ret, se prit d’une belle tendresse pour la jeune fille, qu’il trouvait frêle et blanche comme une demoiselle du quartier Saint-Marc. Il l’épousa. Ce fut de sa part un mariage d’amour, un véritable coup de tête, sans calcul aucun. Quant à Ursule, elle accepta ce mariage pour fuir une maison où son frère aîné lui rendait la vie intolérable. Sa mère, enfoncée dans ses jouissances, mettant ses dernières énergies à se défendre elle-même, en était arrivée à une indifférence complète ; elle fut même heureuse de son départ, espérant que Pierre, n’ayant plus aucun sujet de mécontentement, la laisserait vivre en paix, à sa guise. Dès que les jeunes gens furent mariés, Mouret comprit qu’il devait quitter Plassans, s’il ne voulait entendre chaque jour des paroles désobligeantes sur sa femme et sur sa belle-mère. Il partit, il emmena Ursule à Marseille où il travailla de son état. D’ailleurs, il n’avait pas demandé un sou de dot. Comme Pierre, surpris de ce désintéressement, s’était mis à balbutier, cherchant à lui donner des explications, il lui avait fermé la bouche en disant qu’il préférait gagner le pain de sa femme. Le digne fils du paysan Rougon demeura inquiet ; cette façon d’agir lui sembla cacher quelque piége.

Restait Adélaïde. Pour rien au monde, Pierre ne voulait continuer à demeurer avec elle. Elle le compromettait. C’était par elle qu’il aurait désiré commencer. Mais il se trouvait pris entre deux alternatives fort embarrassantes : la garder, et alors recevoir les éclaboussures de sa honte, s’attacher au pied un boulet qui arrêterait l’élan de son ambition ; la chasser, et à coup sûr se faire montrer au doigt comme un mauvais fils, ce qui aurait dérangé ses calculs de bonhomie. Sentant qu’il allait avoir besoin de tout le monde, il souhaitait que son nom rentrât en grâce auprès de Plassans entier. Un seul moyen était à prendre, celui d’amener Adélaïde à s’en aller d’elle-même. Pierre ne négligeait rien pour obtenir ce résultat. Il se croyait parfaitement excusé de