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LA CURÉE

où il l’avait surprise avec Maxime, c’était celui-ci qui la poursuivait depuis longtemps, qui cherchait à la violenter. Saccard fut horriblement contrarié de l’insistance qu’elle mit à vouloir lui ouvrir les yeux. Il dut se fâcher avec son fils, cesser de le voir. Le jeune veuf, riche de la dot de sa femme, alla vivre en garçon, dans un petit hôtel de l’avenue de l’Impératrice. Il avait renoncé au conseil d’État, il faisait courir. Renée goûta là une de ses dernières satisfactions. Elle se vengeait, elle jetait à la face de ces deux hommes l’infamie qu’ils avaient mise en elle ; elle se disait que, maintenant, elle ne les verrait plus se moquer d’elle, au bras l’un de l’autre, comme des camarades.

Dans l’écroulement de ses tendresses, il vint un moment où Renée n’eut plus que sa femme de chambre à aimer. Elle s’était prise peu à peu d’une affection maternelle pour Céleste. Peut-être cette fille, qui était tout ce qu’il restait autour d’elle de l’amour de Maxime, lui rappelait-elle des heures de jouissance mortes à jamais. Peut-être se trouvait-elle simplement touchée par la fidélité de cette servante, de ce brave cœur dont rien ne semblait ébranler la tranquille sollicitude. Elle la remerciait, au fond de ses remords, d’avoir assisté à ses hontes, sans la quitter de dégoût ; elle s’imaginait des abnégations, toute une vie de renoncement, pour arriver à comprendre le calme de la chambrière devant l’inceste, ses mains glacées, ses soins respectueux et tranquilles. Et elle se trouvait d’autant plus heureuse de son dévouement, qu’elle la savait honnête et économe, sans amant, sans vices.

Elle lui disait parfois, dans ses heures tristes :

— Va, ma fille, c’est toi qui me fermeras les yeux.