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LES ROUGON-MACQUART

avec elle. Louise ne pouvait l’épouser ; Louise savait bien qu’il n’était pas à elle, puisqu’elle les avait vus s’embrasser sur les lèvres. Alors, elle jeta sur ses épaules une pelisse de fourrure, pour ne pas traverser le bal toute nue. Elle descendit.

Dans le petit salon, elle se rencontra face à face avec Mme Sidonie. Celle-ci, pour jouir du drame, s’était postée de nouveau sur le perron de la serre. Mais elle ne sut plus que penser quand Saccard reparut avec Maxime, et qu’il répondit brutalement à ses questions faites à voix basse qu’elle rêvait, qu’il n’y avait « rien du tout. » Puis elle flaira la vérité. Sa face jaune blêmit, elle trouvait la chose vraiment forte. Et, doucement, elle vint coller son oreille à la porte de l’escalier, espérant qu’elle entendrait Renée pleurer, en haut. Lorsque la jeune femme ouvrit la porte, le battant souffleta presque sa belle-sœur.

— Vous m’espionnez ! lui dit-elle avec colère.

Mais Mme Sidonie répondit avec un beau dédain :

— Est-ce que je m’occupe de vos saletés !

Et retroussant sa robe de magicienne, se retirant avec un regard majestueux :

— Ma petite, ce n’est pas ma faute s’il vous arrive des accidents… Mais je n’ai pas de rancune, entendez-vous ? Et sachez bien que vous auriez trouvé et que vous trouveriez encore en moi une seconde mère. Je vous attends chez moi, quand il vous plaira.

Renée ne l’écoutait pas. Elle entra dans le grand salon, elle traversa une figure très compliquée du cotillon, sans même voir la surprise que causait sa pelisse de fourrure. Il y avait, au milieu de la pièce, des groupes de dames et de cavaliers qui se mêlaient, en agitant