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LES ROUGON-MACQUART

L’agent d’expropriation se mit à marcher d’un pas agité, faisant craquer ses bottines vernies sur le tapis.

— Voyez, murmura-t-il, dans quelle situation on se met pour rendre service aux gens !… Mais, mon cher, à votre place, j’empêcherais absolument ma femme de faire une pareille sottise. Je la battrais plutôt.

— Ah ! mon ami !… dit le financier avec un fin sourire. Je n’ai pas plus d’action sur ma femme que vous ne paraissez en avoir sur cette canaille de Baptistin.

Larsonneau s’arrêta net devant Saccard, qui souriait toujours, et le regarda d’un air profond. Puis il reprit sa marche de long en large, mais d’un pas lent et mesuré. Il s’approcha d’une glace, remonta son nœud de cravate, marcha encore, retrouvant son élégance. Et tout d’un coup :

— Baptistin ! cria-t-il.

Le petit jeune homme louche entra, mais par une autre porte. Il n’avait plus son chapeau et roulait une plume entre ses doigts.

— Va chercher le registre, lui dit Larsonneau.

Et, quand il ne fut plus là, il débattit la somme qu’on devait lui donner.

— Faites cela pour moi, finit-il par dire carrément.

Alors Saccard consentit à donner trente mille francs sur les bénéfices futurs de l’affaire de Charonne. Il estimait qu’il se tirait encore à bon marché de la main gantée de l’usurier. Ce dernier fit mettre la promesse à son nom, continuant la comédie jusqu’au bout, disant qu’il tiendrait compte des trente mille francs au jeune homme. Ce fut avec des rires de soulagement que Saccard brûla le registre à la flamme de la cheminée, feuille à feuille. Puis, cette opération terminée, il échangea de