vrait ses signaux, veillant en automate à la sécurité de tant de vies, il songeait au poison ; et, quand il attendait, les bras inertes, les yeux vacillants de sommeil, il y songeait encore. Rien au-delà : il la tuerait, il chercherait, c’était lui qui aurait l’argent.
Aujourd’hui, Jacques s’étonnait de le trouver le même. On tuait donc sans secousse, et la vie continuait. Après la fièvre des premières fouilles, Misard, en effet, venait de retomber à son flegme, d’une douceur sournoise d’être fragile qui craint les chocs. Au fond, il avait eu beau la manger, sa femme triomphait quand même ; car il restait battu, il retournait la maison, sans rien découvrir, pas un centime ; et ses regards seuls, des regards inquiets et fureteurs, disaient sa préoccupation, dans sa face terreuse. Continuellement, il revoyait les yeux grands ouverts de la morte, le rire affreux de ses lèvres, qui répétaient : « Cherche ! cherche ! » Il cherchait, il ne pouvait maintenant donner à sa cervelle une minute de repos ; sans relâche, elle travaillait, travaillait, en quête de l’endroit où le magot était enfoui, reprenant l’examen des cachettes possibles, rejetant celles qu’il avait fouillées déjà, s’allumant de fièvre dès qu’il en imaginait une nouvelle, brûlé alors d’une telle hâte qu’il lâchait tout pour y courir, inutilement : supplice intolérable à la longue, torture vengeresse, sorte d’insomnie cérébrale qui le tenait éveillé, stupide et réfléchissant malgré lui, sous le tic-tac d’horloge de l’idée fixe. Quand il soufflait dans sa trompe, une fois pour les trains descendants, deux fois pour les trains montants, il cherchait ; quand il obéissait aux sonneries, quand il poussait les boutons de ses appareils, fermant, ouvrant la voie, il cherchait ; sans cesse, il cherchait, cherchait éperdument, le jour, pendant ses longues attentes, alourdi d’oisiveté, la nuit, tourmenté de sommeil, comme exilé au bout du monde, dans le silence de la grande campagne noire. Et la Ducloux,