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sans réserve, dès qu’il serait achevé, à l’œuvre qu’elle réclamait de moi comme le devoir d’un disciple demeuré vivant à l’égard du maître mort. Mme Comte, avec plus de raison que je ne croyais alors, pensa que c’était ajourner trop loin ma promesse. Nos discussions là-dessus furent orageuses, car je sentais combien il m’était difficile de la satisfaire, et une rupture entre nous devint imminente. Enfin son opiniâtreté vainquit la mienne. Ses appels à la reconnaissance envers le fondateur de la philosophie positive et envers cette philosophie elle-même triomphèrent de mes difficultés, que j’essayai de ne plus considérer comme des impossibilités, et j’adjoignis à l’urgence de mon dictionnaire l’urgence de cette nouvelle charge qui m’advenait d’une façon inattendue.

Dès lors j’eus à modifier l’ordre de mon travail et à y intercaler la composition de A. Comte et la Philosophie positive : c’est le titre de l’ouvrage qui sortit de ma transaction avec sa veuve. Je jugeai qu’il me faudrait à peu près un an pour cette composition ; et l’exécution n’infligea point de démenti à mon évaluation. Quant à l’impression, qui dura environ autant, elle ne m’inquiétait pas ; car la correction des épreuves appartenait, comme je l’ai, dit, à mes matinées, et y ajouter celle-là n’était pas assez onéreux pour déranger mon temps. A la mise en train de l’œuvre elle-même, j’hésitai entre deux partis ou bien interrompre pendant une année là refonte de mon dictionnaire (j’étais assez en avance du côté de l’imprimerie pour qu’elle me laissât ce délai et ne vînt pas trop tôt me talonner derechef), ou bien me borner à diminuer quelque peu les heures attribuées au dictionnaire, et prendre sur ce retranchement