Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/89

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
87
VIERGES EN FLEUR

bleaux, se haussa sur des sièges pour saisir les détails, effleurant les peintures de ses ongles aigus, les considérant à la loupe.

Philbert était anxieux, redoutait une erreur. Sans doute, il s’était trompé, et il se désolait en pensant à la déception prochaine des trois sœurs.

Les demoiselles de Kerbiquet se tenaient là, très pâles, dans une angoisse suprême, attendant l’arrêt qui serait leur essor vers la vie désirée ou l’éternel emmurement dans la solitude de leur castel.

Enfin Thièlemans se décida à parler.

— Mes petits enfants, fit-il de sa voix lente et cassée, ces machines-là ne sont pas ce que j’espérais. Il y a quelque part, je voudrais savoir où, des œuvres de Watteau qu’on cherche depuis longtemps, et qui vaudraient des sommes inestimables. Cependant ces panneaux sont bien du prodigieux artiste, et j’en offre, tout juste, trois cent mille francs.

— Trois cent mille francs ! balbutia Michelle.

— Trois cent mille francs ! répétèrent ses sœurs.

— Oh ! pas un sou de plus ! déclara Thièlemans.

— Mesdemoiselles, dit Philbert, mon ami, quoique juif, est un fort honnête homme ; je vous parle en ami, concluez le marché.