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VIERGES EN FLEUR

restre. Il n’est ouvert, hélas ! qu’aux riches… pas à nous !

— Il est ouvert à toutes les belles, à toutes les jolies ! Et des adorateurs fervents auraient jeté à vos pieds tout l’or qui vous manquait.

— Si je vous comprends bien, monsieur, vous voulez dire qu’on nous eût achetées. Je pourrais m’offenser de vos propos, mais je sens que vous ne voulez pas me blesser, et que vous me montrez la honte et l’infamie, très inconsciemment, parce que vous êtes habitué à vivre avec des femmes sans dignité, sans cœur. Monsieur, je vous l’ai dit, les demoiselles de Kerbiquet sont pauvres : elles ne sont pas à vendre.

— Cette déclaration est très belle et très noble. Mais les grands mots et les principes hautains ne font pas le bonheur. Et voyez-vous, mademoiselle, la vie réellement n’a qu’un but : la joie ! Pourquoi la repousser et pourquoi la maudire ?

— Mais ce n’est pas la joie que je fuis. C’est la honte…

— Être aimée… une honte !

— Je ne diffame pas l’amour, je condamne l’abjection de celles qui trafiquent de leurs sourires, de leurs corps. Puisque je vous ai fait déjà ma confession, jusqu’au bout je veux être loyale et sincère. Si, par un héritage espéré depuis