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VIERGES EN FLEUR

sente. Ouvrez-moi vos beaux yeux. Je le veux ! Je le veux !

Le jeune homme avait pris Marie-Reine, et ses yeux se posaient sur les paupières closes qui lentement se rouvrirent.

Et l’adorée, encore en son rêve, parla :

— Oui, oui, tu es celui que mon cœur espérait.

Puis ses mains attirant la tête de l’amant, les bouches se mêlèrent en baisers de fiançailles.

La mère, très émue, pleurait et souriait :

— Ah ! monsieur, vous avez sauvé ma pauvre enfant !

— Oui, oui, dit Marie-Reine, il m’a rendu la vie. J’étais comme une morte, au fond de son sépulcre… mon cœur était glacé… mon âme était partie… Et maintenant, je vis, je vis, je vis !

Philbert et Marie-Reine restèrent seuls, dans la claire nuit étoilée. L’amante était assise dans les rochers, et l’amant, à genoux, tenait les douces mains de l’adorée, les couvrait de caresses.

Ils ne parlaient pas.

Quand la suprême joie rayonne en nous, les mots ne sont plus que des sons inutiles, car les âmes alors se joignent, s’entrelacent, fondent leurs voluptés, s’étreignent, s’unifient. Le grand spasme des chairs s’exprime par des râles ; la jouissance infinie des cœurs a le silence de l’extase et de la mort.