Page:Emery - Vierges en fleur, 1902.djvu/306

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
304
VIERGES EN FLEUR

— Mais puisqu’il vit, du moins, l’espoir vous reste encore.

— Non, mon amour est mort, et bien mort. Et si le misérable qui l’a assassiné, reparaissait un jour je n’aurais plus pour lui que mépris et dégoût, pas même de la haine — car celui que l’on hait, on peut l’aimer encore !…

— Mais la joie de revoir — ne fût-ce qu’un instant, l’image qu’on adora, même indigne, infidèle, met un peu de lumière, de clarté dans la nuit.

— Je ne désire pas ce bonheur qui vous hante. Si vous aviez été trompé, si vous aviez souffert comme moi de la félonie, vous ne souhaiteriez pas revoir l’ennemi !

Mme Mercœur interrompit l’entretien :

— Voici la fraîcheur de la mer qui réveille mes névralgies. Rentrons, mes enfants : il se fait tard. Ces braves gens qui vous donnent l’hospitalité ne demandent sans doute qu’à se coucher.

— Mère, fit Marie-Reine, permets que je m’attarde encore, l’air est tiède, ce soir ; tu sais, j’aime à rester ainsi, dans les ténèbres, les yeux levés vers les étoiles. Puis l’aimable compagnon que le hasard nous donne sera mon chaperon — vous voulez bien, monsieur ? Toi, pe-