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VIERGES EN FLEUR

l’océan me ravissent et font que j’aime quelquefois, encore un peu, la vie. Sœurette, je voudrais vivre ici, dans cette île, loin des gens qui m’importunent. Mais ce rêve n’est pas possible. Je ne veux pas commettre ce crime de vous faire partager à notre mère, à toi, mon éternelle désolation.

— Oh ! Marie, tu sais bien que pour te voir moins triste, je serais très heureuse d’exaucer ton désir.

— Oui, oui, je sens qu’ici je pourrais oublier !

Après le repas, les jeunes filles retournèrent à la mer. Philbert écoutait les bavardages de Mme Mercœur, pour se rapprocher de Marie-Reine. En effet, il put s’asseoir près d’elle, sur le même rocher.

— Veux-tu nous faire un grand plaisir, mère ? demanda Jannine.

— Je ne vis que pour mes enfants, et vos vœux sont des ordres pour moi.

— Eh bien, restons ici, quelques jours, quelques semaines.

— Tu es folle, petite. Songe à ta sœur… elle a besoin de mouvement, de distraction…

— Oh ! mère, fit Marie, la solitude m’est douce et salutaire ; si sœurette te prie, c’est pour moi, non pour elle.