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DOUCES AMIES

Sur mes genoux, ton corps s’alanguissait. Je te berçais, tu t’endormais, et mes yeux aussi se fermaient. Nos anéantissements en ces sommeils charmeurs étaient bientôt suivis d’éveils plus tendres ; et nos yeux s’étonnaient de ne pas se rouvrir dans la clarté menaçante de l’aurore qui nous séparerait bientôt.

Les heures sans doute tintaient aux clochers d’alentour ; mais nous n’entendions pas.

Peut-être étions-nous morts ; peut-être était-ce le ciel ! Le plus radieux, le seul désirable : l’éternelle communion du baiser, de l’amour !…

Hélas ! nous ne fûmes pas exaucés ! Mais devons-nous, ma douce aimée, nous plaindre, puisque nous la recommencerons, cette nuit, avec toutes ses joies, avec toutes ses ivresses !

Des voix dans le parc, près de nous, avaient résonné ; des promeneurs, charmés par la douceur de cette nuit de printemps, s’attardaient, s’entretenaient… Ils passèrent près de notre nid… Je me sentis un froid au cœur : la pour de te perdre bientôt était ressuscitée. Je fermai les yeux pour ressaisir le songe enfui, m’endormir encore en cette mort illusoire… Mais ta bouche se posa sur mon front, appela ma bouche, réclamant encore avant l’adieu d’autres baisers.

Et j’aperçus, dans la nuit noire, deux étoiles qui brillaient, deux étoiles mystérieuses, des-